Blasphemia

Heresy

31/10/2018

Autoproduction

Selon le site référentiel Encyclopedia Metallum, il existe quatorze HERESY recensés dans le monde. Six d’entre ont sont classés Thrash, ce qui nous fait un paquet d’homonymies et des possibilités de méprises infinies. Alors pour être certain que nous parlons bien du même et éviter les confusions, cet HERESY  vient du Costa Rica, et il est seul prophète du nom en son pays. Avec cette précision en tête, et pour les connaisseurs, il sera donc impossible de se fourvoyer dans des comparaisons décalées, d’autant plus que ces musiciens commencent à se faire une jolie réputation en dehors de leurs frontières. Forcément, avec un premier LP de la trempe de Worldwide Inquisition, il y a de quoi se faire des amis, même si le laps de temps écoulé pour obtenir une suite à l’aventure fut plus que conséquent. Pensez-donc, pas moins de six années pour élaborer un second chapitre, qui prend enfin forme sous les traits francs mais toutefois subtils de ce Blasphemia, qui en termes de Metal ne prône pas le blasphème, mais bien le respect des tables de loi les plus fondamentales. Et si les croyances et dogmes sont respectés, l’allusion va beaucoup plus loin qu’une métaphore de surface, ce que je compte bien vous expliquer un peu plus loin. Fondé en 2011, ce quatuor qui joue fort (Jos Raley - Chant/guitare, Blop Heresy - basse, Kev Venegas - guitare et Dennis Abrahams - batterie) a donc quelques réalisations à son actif, dont ce premier longue-durée déjà évoqué, qui fut en son temps précédé d’un premier EP (Heretics to the Fire en 2011), et suivi d’une compilation live (The European Trials Tour en 2015). Quelques singles annonciateurs furent aussi lâchés en éclaireurs, et Blasphemia vient donc témoigner des progrès accomplis par le groupe depuis sa fondation, progrès conséquents et qui s’inscrivent dans une tradition old-school classique certes, mais fort pertinente. Et si j’abordais la foi et la religion en préambule, c’était en guise de contexte, puisque nos amis du Costa Rica ne sont pas sans rappeler un fameux groupe de White Metal de leur propre créneau…

C’est en effet à BELIEVER que la musique des costaricains fait irrémédiablement penser, époque Extraction From Mortality, particulièrement à cause du timbre aigu et rauque de Jos Raley qui ressemble fortement à celui du frontman croyant Kurt Bachman. Et musicalement parlant, la donne est assez similaire, même si on pourrait envisager ce second LP comme une sorte de crossover géant utilisant les références usuelles, dont les principales seraient celles de la seconde vague de Thrash US, et les FORBIDDEN en tête de liste. Un mélange détonnant et performant donc, qui utilise toutes les armes à sa disposition pour parvenir à ses fins, et qui ne se contente pas de provoquer un simple headbanging pour vous réveiller le matin. Nous avons donc droit à tout le catalogue des possibilités, du fatal qui râle au cadencé mesuré, pour une balade menée bon train dans les jardins fertiles de la Bay Area, le tout transposé dans un vocable de production très actuel, histoire de ne pas jouer les nostalgiques indécrottables. Qualités individuelles notables, performance globale séduisante, et surtout, beaucoup de changements, de nuances, d’adaptations, de digressions, pour des morceaux qui accumulent sans thésauriser, et qui se montrent aussi accrocheurs que proportionnés. Tous les atouts sont d’ailleurs exposés dès l’entrée en matière de « Downpour », qui ne fait pas grand mystère de son crédo, et qui se rapproche donc d’une synthèse des deux premiers albums de BELIEVER, tout en étalant sous nos ouïes ébahies des motifs hautement redondants qui prennent au marteau et à l’enclume. Syncopes marquées, brisures bien amenées, et chant complètement possédé, à la limite d’un Hardcore vociféré, bien que le style soit complètement ancré dans un Metal chauffé à blanc et digne des meilleurs productions d’antan. Mais en sept morceaux seulement et un peu plus d’une demi-heure, les costaricains n’ont pas le temps de traîner, et cherchent à convaincre coûte que coûte, quitte à utiliser des thématiques éprouvées (« Last Night God Talked to Me »), pour mieux les détourner façon progressif sans sombrer dans la prétention. Les mélodies, très présentes, se montrent alors sous un jour agressif, pour nous rappeler le meilleur de MORTAL SIN et de FORBIDDEN, tout en louchant sévèrement du côté d’EXODUS, celui des nineties, qui connaissait alors un surplus d’énergie dans la gravité.

En se reposant sur une rythmique inventive et pulsant comme un satellite qui gravite, le quatuor fait parler la poudre, et laisse même de temps à autres la basse se révéler sous un jour claquant, tandis que les deux guitares ne semblent admettre aucune pause. Et avec un chanteur de la trempe de Jos, tout est permis, lui qui oscille entre provocation graineuse et invocation haineuse, tout en lestant l’instrumental de phrasés précis. Le travail en lead de Kev est lui aussi notable, même si le soliste n’en profite pas pour boucher tous les espaces, et l’unisson provoqué par les quatre instrumentistes a de faux airs d’énorme déflagration, atténuée régulièrement par des bouffées d’air harmonique faisant un bien fou. Beaucoup d’équilibre donc dans le classicisme, et des envies, dont celle de se nourrir de sonorités d’époque pour faire avancer la machine. Et alors que les morceaux courts se permettent parfois des incursions du côté d’un Heavy Speed vraiment épais (« The Pagan »), ou d’un Heavy Thrash lourd comme le marteau d’ANVIL sur une enclume SLAYER (« The Hive »), les plus développés montrent des signes d’ambition, à l’instar de l’évolutif « Sharpointing », qui utilise la densité d’un DARK ANGEL pour élargir le spectre de méchanceté, sans jamais se départir de cette richesse d’arrangements qui permettent aux passages les plus convenus de sonner frais. Pas mal de violence donc, mais jamais gratuite, et de la variété pour ne pas laisser les BPM s’affoler, et de quoi rassasier tous les amateurs d’un Thrash intelligent et bien enrobé, qui bouscule autant qu’il n’inculque. Des valeurs de construction bien sûr, même si le spectre du Techno-Thrash est laissé dans l’ombre au profit d’un Heavy étudié et placé, même si certaines idées auraient parfois mérité un peu plus de maturité (« Suiciety »).

Le groupe se lâche même à l’occasion d’un final étrange en Ambient, sorte de porte de sortie dérobée en mélodies prononcées (« Blasphemia », délicieux et très TESTAMENT), et offre ainsi une conclusion un peu moins évidente pour nimber son second effort d’un peu de mystère. Mais avec une majorité de titres qui percutent et un investissement non sans but, les HERESY reviennent en force sur le devant de la scène, et s’affirment comme une valeur montante qu’il conviendra de suivre avec attention. Pas encore le chef d’œuvre que l’on est (peut-être) en droit d’attendre d’eux, mais un pas de plus vers la médaille d’honneur, et de quoi se distinguer sur un tableau déjà très chargé d’homologues internationaux. Gageons qu’avec Blasphemia, vous ne confondrez plus le Costa Rica avec les Etats-Unis ou l’Australie.    


Titres de l'album :

                          01. Downpour

                          02. Last Night God Talked to Me

                          03. The Pagan

                          04. The Hive

                          05. Sharpointing

                          06. Suiciety

                          07. Blasphemia

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par mortne2001 le 11/12/2018 à 17:38
80 %    807

Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


jefflonger
@90.51.17.10
21/12/2018, 18:01:35
La référence à Believer m'a poussé à ecouter les extraits proposés et j'aime beaucoup. Du très bon thrash.

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