By Chance

Mora Prokaza

03/07/2020

Season Of Mist

Le mélange des genres, et si possible diamétralement opposés, on connaît bien. D’autres s’y sont frottés avant, et d’autres continueront de s’y gratter après. Alors, d’ANTHRAX sympathisant avec les PUBLIC ENEMY, de PAINKILLER saturant le Grind et Jazz, SHINING, BABYMETAL, RAGE AGAINST THE MACHINE, MORBID ANGEL qui fricote avec la Techno, KORN qui s’amuse à rebondir sur du Dubstep, DEATHSPELL OMEGA, le Classique qui danse le menuet avec le Power Metal, Pat Boone qui s’amuse à reprendre des standards Hard Rock, le lounge Rock de Richard Cheese, après tout, moi je ne suis pas contre, j’aime bien les idées un peu branques dans l’ensemble. Et puis d’autres aussi tiens, ZEAL AND ARDOR, et puis bientôt, un mixage entre AOR et Lolicore, avec du JOURNEY passé en 78 tours et chanté par un vieux japonais de 65 ans, en socquettes et jupette, le regard libidineux dans un manga cauchemardesque à propos d’un taré qui collectionne les flacons d’urine et les ongles de pied d’écolières mignonnes et immaculées comme une culotte blanche. Mais le métissage entre deux styles contraires, c’est un peu comme le dosage entre sucré/salé. Trop d’ananas et on ne sent plus le goût des rognons, trop de foie de veau et on oublie les fraises. Mais j’ai l’habitude de traiter du cas de flingués notoires qui ne peuvent pas se contenter du tout-venant et qui se sentent obligés de hacher et mixer des ingrédients qui visiblement ne vont pas ensemble. Après tout, j’ai adoré le KORN qui se prenait pour le père de Skrillex en cure de jeunisme, je suis un des rares à avoir défendu le mariage contre nature entre METALLICA et Lou Reed, et j’ai aussi porté aux nues le MORBID ANGEL qui se croyait perdu dans une boîte louche de Berlin. Alors, quel meilleur avocat du diable que moi pour accepter le dossier chargé de MORA PROKAZA, qui contrairement à ce que son nom indique n’est pas le frère slave de Matt Pokora sous prozac, mais bien un véritable groupe à part entière ? Ou plutôt à petites parts différentes.

On ne va pas se la jouer secret de toute façon polichinelle, les MORA PROKAZA sont des gens bizarres qui font une musique pour gens étranges. Depuis leur création en 2013, une gigantesque hype les a nimbés comme une aura, et ils comptent au moins autant de détracteurs que de fans acharnés. Deux albums auront suffi aux originaires de Minsk pour se faire les dents du succès underground, Bringer of Plague en 2015 et Dark Universe l’année suivante. Il faut dire que Farmakon (basse, chant, guitare) et Hatestorm (batterie) savent y faire pour ne ressembler à personne, même pas à eux-mêmes d’ailleurs, et tout le monde est aujourd’hui au courant que leur musique ne s’adresse pas à tout le monde, mais qu’elle déclenche des réactions épidermiques. Aujourd’hui, au moment de négocier le virage dangereux de leur troisième album, les biélorusses ont mis le paquet pour que les puristes les regardent de travers. Ils ont en effet enfilé un drôle de costume, celui de deux clowns pouvant rivaliser avec les INSANE CLOWN POSSE en version plus diabolique et ténébreuse, en faisant un choix qui paraît évident pour eux, mélanger le BM de l’est et la Trap music des années 2000. Si vous ne connaissez pas le Trap, dites-vous que quelque part, c’est encore un truc de malins un peu feignants obsédés par le marquage du tempo, avec de grosses lignes de basse, des breakdowns en veux-tu en voilà, et une obsession pour le kick et les tempi marqués comme des marteaux sur les enclumes. Un machin bizarre né dans le sud des Etats-Unis et qui a bien évidemment conquis la jeunesse locale à grands coups de drops démoniaques et marqué par un flow ininterrompu, genre Regan de The Exorcist possédée par l’esprit des ONYX. Un bouzin qui aime bien les grandes orchestrations aussi, et de fait, les MORA PROKAZA ont décidé de fondre cet esprit nouveau dans un corps ancien, et d’en proposer une version méchamment evil, avec un chant aussi rauque et erratique qu’un démon égaré dans un Wallmart. Le concept n’est évidemment pas inintéressant en soi, mais beaucoup de concepts le sont jusqu’à ce qu’on constate le rendu, pas toujours à la hauteur. Et dans le cas des biélorusses, je reste méchamment sceptique.

Les morceaux se défendent d’eux-mêmes, et le mérite des deux compères est d’avoir commencé By Chance par l’un de ses titres les moins compromis et ambiancé. « WIMG » ne fait pas vraiment dans la dentelle, s’annonce à grands renfort d’arrangements grandiloquents (on se croirait fans un péplum de l’an 1962), avant de vomir son originalité dans un déluge de gros morceaux de chant qui dégueulent des textes qu’on ne comprend évidemment pas. Le background ne fait pas semblent d’en faire trop, et ce néo-classique à tendance Rap et Core peut séduire les plus exigeants en matière de mixage brutal et désaxé, mais on sait pertinemment qu’un LP se juge sur la durée, et non sur ses courtes réussites. De ce côté-là, avec seulement trente-et-une minutes, By Chance n’a rien laissé au hasard si vous me pardonnez le jeu de mots. En gardant sous le coude l’idée que les idées les plus culottées sont comme les meilleures blagues, à savoir les plus courtes, les deux acolytes n’ont pas chargé la mule, et se sont arrêté pile là où il fallait. Bien vu, parce qu’avec dix minutes de plus, l’opération tournait au cauchemar. Je respecte l’envie d’ailleurs des créateurs qui n’ont plus envie de répéter des recettes déjà connues, mais j’avoue aussi que je ne suis pas toujours client. Ce troisième album fonctionne, dans ses parties les plus nuancées, très bien anticipées d’ailleurs par « I’m Not Yours ». Instrumental délicat, un peu inquiétant sur les bords, chant traité qui évidemment en fait trop et laisse passer le Gangsta Rap comme un bidon de lait à la caisse, mais étrangement, le tout manque de folie, et surtout, de lucidité. S’en remettant à un gimmick amusant sur les premières minutes, MORA PROKAZA parvient parfois à nous extirper de notre léthargie, mais ne parvient pas à convaincre sur la longueur.

Certes, l’ambiance est gentiment mortifère, menaçante, et une chanson comme « Madonna » vaut à elle seule le déplacement. « I See It This Way » mérite aussi le détour, malgré ses six minutes bien tapées, mais le sentiment d’écouter un album de Rap enregistré par deux MC un peu trop portés sur l’occultisme cheap finit par lasser. Le chant, relativement insupportable passé un certain laps de temps n’aide pas non plus à faire preuve de mansuétude, et lorsque l’album se termine, on est assez heureux. Je préfère à la limite écouter DIE ANTWOORD, ou même DALEK d’ailleurs, plus convaincants dans leur approche. Mais si la curiosité est un si vilain défaut, ne manquez pas l’occasion de poser une ou deux oreilles sur cet album. Sur un malentendu, vous pourriez aimer.                                        

  

Titres de l’album:

01. WIMG

02. I’m Not Yours

03. Check It

04. Im A Human

05. Be There

06. I See It This Way

07. Madonna

08. Sorry Man

09. Blacker Than Black


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par mortne2001 le 18/03/2021 à 19:24
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