Evilution Apocalypse

Virus

14/08/2020

Combat Records

Si je devais énumérer tous les comeback inespérés du Metal de ces quelques dernières années, certains battraient le haut du pavé de leur improbabilité. Et s’il en est un que personne n’attendait à part quelques accros à l’underground très au fait de l’actualité dans les années 80, c’est bien celui des anglais de VIRUS (quoique l’année s’y prête particulièrement). Pensez donc, un premier album estampillé Hardcore de pauvre joué avec des moufles que le groupe a même renié par la suite en le qualifiant « d’horreur », un second plus volontiers Thrashcore grâce à l’adjonction d’un nouveau guitariste à la culture Thrash plus prononcée, et un troisième et ultime adieu Lunacy, paru plus ou moins dans l’indifférence générale. Je l’admets, le groupe de Brighton a quand même animé mon adolescence de ses riffs rebelles, et de ces deux albums (Force Recon et Lunacy) honorables, représentant un pan de la culture extrême anglaise qui nous permettait d’oublier tous les ratés dont on pouvait constater les dégâts sur la fameuse double compilation Best Of British Steel. Cette compilation permettait d’envisager dans sa globalité la pauvreté de la scène Metal anglaise de l’underground à la fin des eighties, et entre un RE-ANIMATOR en phase terminale, un ACID REIGN s’engluant dans ses blagues faisandées, un LAWNMOWER DETH au ras de la tondeuse, un DEATH TRASH dont il valait mieux oublier l’existence par décence, et d’autres encore moins recommandables, on se retrouvait avec un SABBAT bien isolé dans sa quête de qualité. Alors, retrouver les VIRUS plus de trente ans après leur disparition s’apparente à une sorte d’Hibernatus du pauvre, tant on n’attend pas grand-chose de ce retour inopiné, que le seul musicien d’origine encore présent a pourtant patiemment élaboré.

En effet, on ne retrouve dans les rangs du groupe que le pauvre Coke McFinlay, à la guitare et au chant, qui après avoir vainement essayé de motiver ses anciennes troupes a finalement décidé de faire appel à du sang frais pour proposer ce quatrième album qui n’aurait logiquement jamais dû voir le jour. De l’extérieur, on trouvera l’entreprise un peu vaine et personnelle, réservée à un petit noyau de fans attendant encore leur petit messie, et pourtant, comme dans le cas d’ACID REIGN, ce comeback est un petit miracle en soi, et un méchant coup de pompe dans la fourmilière old-school qui doit trembler de voir d’anciennes gloires remonter au créneau avec autant de fougue. Admettons-le avec franchise, je m’apprêtais à me gausser de cet Evilution Apocalypse au titre aussi habile qu’un calembour de Bernard Mabille, spécialement après avoir pris acte de sa durée déraisonnable approchant l’heure de jeu. Je concédais qu’après une si longue absence, Coke avait certainement beaucoup de choses à dire plus ou moins habilement, mais je n’espérais certainement pas un tel déluge de Thrash de première catégorie, renvoyant la jeune génération à ses chères études. Certes, nous n’en sommes pas encore au niveau des miraculeux POWER TRIP ou des hilarants MUNICIPAL WASTE, mais le VIRUS estampillé 2020 (la pire année pour la musique depuis la naissance de Jul et Aya Nakamura) renvoie celui des années 80 dans les cordes desquelles il n’aurait jamais dû s’extirper. Sans crier au génie, ce quatrième LP est d’une excellente facture, et mérite au même titre qu’ACID REIGN des encouragements, et surtout, la confirmation qu’une telle reformation n’était pas qu’un caprice dont les fans de Thrash pouvaient se passer.

Première et importante constatation, l’inspiration est là, et méchamment plurielle. Coke, sans s’éloigner de son inspiration de base, passe en revue toutes les composantes du genre depuis son émergence, s’éloigne un peu du Crossover pour se rapprocher d’un Thrash plus classique, adopte une technique plus poussée, mais laisse la basse gronder et rouler, et livre des compositions qui donnent clairement envie de headbanger. Et si « Evilution Apocalypse » laisse planer encore quelques doutes sur la validité de l’expérience (voix traînante, thème usé jusqu’à la corde, chœurs de stade de foot), « The Hand That Feeds You » remet vite les pendules à l’heure anglaise, et lâche des riffs capables, des sifflantes démentes, et place l’effort sous des auspices généreux et brutaux. On apprécie en outre cette production méchamment analogique, et qui nous évite le côté stérile des albums les plus récents de TESTAMENT ou HEATHEN, ce côté underground dans les graves qui continue de propager le message, et finalement, la signature sur le Combat dirigé d’une main de fer et d’un esprit ouvert par Dave Ellefson se justifie en quelques morceaux bien sentis. D’ailleurs, Coke en a profité pour inviter quelques guests à tailler le bout de gras, avec la présence de Carlo Redagas ex-guitariste de CARCASS et du chanteur Thom Hazeart, connu pour avoir taquiné le micro pour le bassiste de MEGADETH.

Alors, certes, cinquante-cinq minutes de jeu, mais aucun ennui, puisque tous les tempi y passent, et que les guitares rugissent comme des lionnes en rut. La batterie n’est pas en reste non plus, et fricote violemment avec le Thrashcore, imitant DEATHROW et WEHRMACHT sur le bestial et incontrôlable « Basement Conversion » qui nous ramène à la violence des années 80. VIRUS est donc salement en forme et contagieux, et cet album qui aurait pu tourner à la mauvaise blague se montre solide de bout en bout, osant des arrangements d’orgue grandiloquents (« Goat (Father, Scum and Unholy) ») pour détourner la messe en partie fine de blasphème (encore une fois, cette vélocité fort à propos me donne des envies de péché), mais n’oublie pas l’humour pour autant, l’une des constantes du Thrash anglais des eighties. C’est ainsi que le terrible et irrésistible « Defective Detective (The Ballad Of Inspector Gadget) » offre une pause bienvenue dans la déferlante de violence, saluant les S.O.D, et moshant comme un beau diable. Et on a beau chercher la petite bête parce qu’on déteste avoir tort, on ne la trouve pas, même si évidemment quelques plans sentent le réchauffé sur le barbecue entre deux saucisses et trois haricots. Le combo fait même allusion à son passé via « Force Recon », mais termine dare-dare avec une ultime saillie Thrash de première catégorie. Soli propres et excellents, chant ferme et hargneux, batterie en roue libre, Evilution Apocalypse n’est peut-être pas l’apocalypse annoncée, mais c’est un retour en forme inespéré, et l’assertion que les anciens ont encore des trucs méchants à hurler. Bravo à toi Coke pour ce retour un peu à la bourre, mais qui permet de ramener ton groupe à la surface des mémoires. 2020, l’année du VIRUS.  

                                                                                                                       

Titres de l’album:

01. Evilution Apocalypse

02. The Hand That Feeds You

03. Basement Conversion

04. Goat (Father, Scum and Unholy)

05. Multiple Wargasm

06. Defective Detective (The Ballad Of Inspector Gadget)

07. MBG

08. Force Recon

09. Release The Dead


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par mortne2001 le 02/09/2020 à 18:14
85 %    372

Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


LeMoustre
@93.4.16.166
02/09/2020, 18:56:35
A savoir quand même qu'un EP de fort bonne facture est sorti entre temps (A New Strain... 2013) présentant un Virus dans une forme tout à fait convenable (meilleur que Lunacy, par exemple), en plein au moment où Coke (qui cause correctement Français du fait d'attaches familiales) tournait en Europe.
"Force Recon" renvoie en effet au second album avec son riff principal. En plus, le son est très axé guitares, chose significative.
Merci pour ce papier, m'en vais voir si c'est sorti en dur.

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