Iron Will of Power

Urn

20/09/2019

Season Of Mist Underground Activists

Le Blackened Thrash, c’est un peu comme le Punk à l’époque, ou le Crust un peu plus tard. Dans les fondements, c’est une musique simple à jouer dans sa forme la plus primaire, mais qui demande beaucoup d’intelligence pour peu qu’on souhaite la rendre intéressante. N’importe quel groupe peut sortir un album de Thrash à relents Black avec quelques notions des deux genres, mais parvenir à les unir pour vraiment faire partie de la famille n’est pas chose facile. L’underground regorge de ces formations insipides nous inondant de splits, de démos, de EP, le plus souvent cautionnés en tape par d’obscurs labels préférant la quantité à la qualité, mais le fan lui sait faire la différence entre une bouse habillée comme un LP, et un véritable LP qui sent la bouse. Parce que quelque part, un bon album du cru doit empester les tripes, celles qui servent à proposer des plans moins faisandés que la moyenne. Et des tripes, les finlandais d’URN en ont, depuis le début de leur carrière, et il semblerait qu’ils aient appris à les contracter pour leur donner encore plus de puissance. En effet, ce cinquième album de la horde de Tampere est certainement le travail le plus achevé de leur carrière, depuis l’introductif 666 Megatons, au titre qui en disait long sur la naïveté des intentions. Et si The Burning, publié en 2017 est toujours dans les mémoires, il va falloir le mettre de côté pour apprécier cet Iron Will of Power, qui sous couvert d’un titre en lieu commun, nous dévoile le visage moins grimaçant d’un groupe qui tend vers la professionnalisation et la perfection dans la débauche.

Pourtant, pas grand-chose n’a changé. Les vestes à patches sont toujours à, flanquées de cartouchières, les mines sont toujours patibulaires,  et les sobriquets d’actualité. Ainsi, Sulphur (basse/chant), Axeleratörr (guitare) et Gravementor (batterie) n’ont pas troqué leur bestialité pour une légitimité de surface, et assument toujours leurs tendances depuis maintenant plus de vingt-cinq ans, en faisant l’un des plus anciens représentants du genre. Ce qu’on reprochait au groupe jusqu’à présent, c’était cette complaisance apparente qui les faisait se satisfaire de thématiques un peu faciles. La facilité a désormais été rangée dans le placard du passé, tout comme les mélodies un peu Folk du précédent album. Aujourd’hui, le trio se présente sous un jour imperfectible, un mastodonte du ring qui utilise toutes les armes et clés à sa portée pour proposer une musique vraiment efficace et entêtante, et plus simplement bestiale et débauchée. Les harmonies, moins Viking du pauvre mais toujours liées à l’héritage de BATHORY, le chant rauque mais contrôlé, et surtout, les motifs qui s’incrustent dans les neurones et les affaiblissent (« Spears of Light », de loin le meilleur morceau jamais composé par le trio) rendent ce cinquième album terriblement compétitif, et surtout, bien plus intéressant que la moyenne de la production actuelle. Les influences/corrélations avec DESTROYER 666 ou AURA NOIR sont toujours plus ou moins pertinentes, mais l’attitude Punk, sans disparaître, s’est atténuée pour offrir un peu plus que deux ou trois cris gutturaux sur fond d’instrumental bâclé. D’ailleurs, même les soli ont été travaillés pour atteindre un niveau plus qu’honorable, ce qui en dit long sur le désir de légitimité du combo.

Différence notable avec les pollueurs bruitistes, la durée et la progression des morceaux offerts. On sent que malgré les gimmicks et le look un peu téléphonés, les URN ne se voient pas comme de simples amuseurs de galerie encombrés de trophées en mousse, mais bien comme des musiciens aux aspirations pleines. Et en effet, les compositions sont riches, évolutives, évidemment brutales, mais pas gratuitement. Ce nouveau traitement des mélodies permet d’atteindre un niveau assez conséquent, ce que démontre avec véhémence « Downfall of Idols » en entame de LP. Des blasts certes toujours présents, mais une volonté de développer des riffs plus épais, plus concentriques, et assez proches des racines du BM des années 90. Soulignons d’ailleurs le travail remarquable d’Axeleratörr qui s’est vraiment creusé la tête pour sortir de sa guitare autre chose que de simples figures imposées, et qui multiplie les arrangements d’arrière-plan, tout en imposant une grandeur lorsque les graves s’incrustent. Loin d’un décalque de SODOM arrangé à la sauce old-school, Iron Will of Power est aussi puissant qu’il n’est intelligent, et s’il subsiste encore des traces d’ancienneté et d’immédiateté, on comprend que les titres les plus impulsifs ne sont plus de simples prétextes cathartiques à un déferlement de trivialité (« Malignant Strange Vision »). Osant même jouer la carte de l’accroche gluante, les finlandais ont peaufiné leur optique, et profitent d’une créativité renouvelée pour taquiner le Heavy Metal le plus classique, dénaturé d’un vice Thrash assumé (« Funeral Oath »). De véritables intros, des démonstrations de grandiloquence (« Prayers »), et surtout beaucoup de pertinence dans les ambiances (« Demonlord »), pour un LP qui servira à n’en point manquer de référence à l’avenir.

On se laisse donc entraîner sur la piste d’un hommage à la scène Thrash allemande des années 90, qui s’autorise des incartades arythmiques alléchantes (« Hunted »), mais qui n’a pas oublié qu’une bonne chanson c’est d’abord une bonne idée, un scénario vraiment écrit, et non pas une simple improvisation sur des thèmes trop classiques. Les mélodies, omniprésentes, n’enterrent pas la violence sous une chape de niaiserie harmonique, mais au contraire l’amplifient, aboutissant à une sorte de Blackened Thrash lyrique, mais pas lénifiant pour autant. « Will to Triumph » en épilogue, nous replonge dans la conquête du Walhalla par Quorthon, multiplie les cassures, bombe le torse d’une rythmique épaisse, et accumule les bonnes idées (quelques tierces, des chœurs noyés dans le mix, un crescendo emphatique qui s’écrase sur un déchaînement de brutalité), pour permettre à ce cinquième tome de se hisser au rang des meilleures réalisations du trio, si ce n’est la meilleure. La simplicité n’empêche pas l’ambition, les ambitions n’empêchent pas la pertinence, et l’un dans l’autre, après vingt-cinq ans passés au service d’une cause, les URN ont fini par servir la leur. De faire oublier que le Blackened Thrash reste la plupart du temps un simple crachat à la face du bon goût, et peut se prévaloir de qualités artistiques nobles, mais pas élitistes pour autant.             

 

Titres de l’album :

                       1. Downfall of Idols

                       2. Malignant Strange Vision

                       3. Funeral Oath

                       4. Prayers

                       5. Gates to Hyboria

                       6. Demonlord

                       7. Spears of Light

                       8. Hunted

                       9. Will to Triumph

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 27/12/2019 à 17:36
82 %    630

Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


Jus de cadavre
membre enregistré
28/12/2019, 13:08:10
Excellent album ! Parfait dans le style !
Merci pour la chro.

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Test de nouvelle vidéo

grinder92 11/09/2020

Vidéos

From This Day Forward

mortne2001 10/09/2020

From the past

...And Justice For All

mortne2001 08/09/2020

From the past

Slayer + Megadeth 2011

RBD 05/09/2020

Live Report

Manifest Decimation

mortne2001 31/08/2020

From the past

Opeth 2006

RBD 29/08/2020

Live Report

Widespread Bloodshed/Love Runs Red

mortne2001 24/08/2020

From the past

PILORI / Interview

Baxter 18/08/2020

Interview

Dead can Dance 2013

RBD 15/08/2020

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
grinder92

Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)

16/09/2020, 22:12

grinder92

 

16/09/2020, 21:51

grinder92

16/09/2020, 21:49

grinder92

  Affichage des smileys

16/09/2020, 16:48

grinder92

 

16/09/2020, 15:51

grinder92

15/09/2020, 22:30

grinder92

15/09/2020, 22:06

grinder92

  

15/09/2020, 19:09

grinder92

 

15/09/2020, 18:39

grinder92

 

15/09/2020, 18:38

grinder92

Affichage de Smileys  

15/09/2020, 13:57

grinder92

test de fonctionnement

15/09/2020, 13:57

senior canardo

gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)

11/09/2020, 12:32

Humungus

Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???

11/09/2020, 10:59

Living Monstrosity

Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)

11/09/2020, 08:04

Humungus

Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...

11/09/2020, 07:25

RBD

Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)

10/09/2020, 21:27

Arioch91

Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)

10/09/2020, 11:22

Arioch91

J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)

10/09/2020, 11:18

Nubowsky

L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.

10/09/2020, 09:45