Vous vous souvenez de ces petits albums de Thrash sortant par kilos dans les années 80, la plupart du temps sur de micro-labels ou sur des structures indépendantes comme Wild Rags, New Renaissance, Grind Core ? De ces maquettes qui semblaient prometteuses et qu’on découvrait grâce aux plaisirs du tape-trading autour du monde ? Ces pochettes faites main, ces remerciements qui alignaient les pseudos et les adresses mystérieuses, les photos photocopiées, et la production oubliée à la superette du coin ? De cette période bénie est née ma passion pour le Thrash, le sous-genre le plus prolifique du Metal dans la seconde partie des années 80, et qui émergeait invariablement d’Allemagne, d’Amérique du Sud ou du nord. Aujourd’hui, cette passion est restée intacte, et je débusque toujours les nouveautés susceptibles de me faire replonger dans ma jeunesse, même si je suis un peu las de cette mode vintage actuelle qui cherche tous les artifices pour sonner comme, mais qui ne sonne pas comme. De temps à autres, en fouinant plus en profondeur dans les abysses de l’underground, je parviens à dénicher une petite pépite qui mérite le détour, pas forcément pour ses qualités musicales, mais pour l’ambiance d’amateurisme qui s’en dégage et qui me permet de ressentir à nouveau ce frisson, celui qui parcourait mon échine lorsque j’ouvrais les courriers de mes correspondants américains ou allemands. Direction le Colorado pour ça, histoire d’y rencontrer un quatuor éminemment sympathique qui nous propose son premier EP à compte d’auteur, et moins de trente minutes de musique débridée et impétueuse.
De Pueblo viennent donc ces nouveaux chevaliers du son intact et de l’attitude, et Join, Or Die!, leur première œuvre ne pouvait avoir titre plus explicite. Formé en 2015, ce quatuor (Ray Kissick - guitare/chant, Tai Conger-Vigil - basse, Isaiah Rivera - guitare et Raphael Lozano - batterie) aura quand même mis cinq années à se dévoiler via un premier format court qui mérite toute votre attention si les véritables eighties vous manquent. En fusionnant le radicalisme en vogue dans la Ruhr de 86/87, et la lourdeur américaine effective de la même époque, les RETENTION vous enferment entre leurs murs suintant de décibels, et remettent à l’honneur le Thrash underground tel qu’on l’aimait tant il y a trente ans. Première constatation : mazette, quelle pochette ! Vilaine comme il faut, au trait grossier, au motif classique mais sublimé par une gaucherie graphique admirable, elle attire l’œil et ferait merveille sur le recto d’une cassette sortie de nulle part. Merci les mecs d’avoir oublié le numérique actuel qui fait des ravages au niveau des rétines, et d’avoir osé le truc au crayon de papier qui sent bon l’authenticité. Ensuite, la musique. Brutale, viscérale, sans concession, complètement brouillonne, mais délibérément euphorique. Reprenant à leur compte les recettes de quelques fameux OS dont INDESTROY, HEXX, HIRAX et quelques autres, les RETENTION tapent là où ça fait du bien, et livrent leur lot de saccades, de breaks prévisibles, de reprises convenues, et d’accélérations attendues. Rien qui ne surprenne ici, que du traditionnel, et en sus, enrobé dans un son qui défie les convenances. A la limite, et sans savoir, on pencherait pour une démo égarée par un label de l’époque refaisant surface aujourd’hui, tant tout y est. La guitare qui bouffe toutes les fréquences médium, le chant trop en avant, et la batterie sacrifiée sur l’autel de la crédibilité du Morbid Visions de SEPULTURA.
Tous les détails ont été peaufinés, jusqu’aux soli qui sonnent complètement foireux, comme si un élève de la Bay-Area avait pris des cours avec feu Kurt Cobain. Hautement perfectible, redondant en diable, le Thrash des originaires de Pueblo est une approximation à lui seul, et le parangon d’une époque malheureusement révolue. On aime ce son de caisse claire à rendre Lars « St Anger » Ulrich fou de jalousie de n’avoir pas osé aller jusque-là, ces brutales embardées à la KREATOR des premières années, cette longueur de morceaux qui défie l’entendement (trois titres au-dessus des six minutes malgré le manque d’idées, il faut les placer !), cette basse qui lorsqu’elle se fraie un chemin sonne comme celle de Shane Embury passée au micro-ondes, et ce sens de l‘à-propos épique et brutal développé sur le hit fatal « Join, or Die ! ». Tout sent bon le passé, le passéisme avoué, l’envie d’en découdre, et le brouhaha sonore que rien ne vient édulcorer. Loin de la perfection dans la vénération de la nouvelle génération, RETENTION pousse le bouchon de l’admiration DIY dans ses derniers retranchements, et signe un manifeste de bon goût dans le mauvais doigt. On respire l’air de l’Amérique des eighties, de la Californie enragée, dont tous les musiciens semblaient faire partie à un moment donné. Nous avons même droit aux pertes de son ponctuelles qui donnent le sentiment d’écouter une tape un peu abimée. Alors, certes, l’approche est maladroite, le rendu inexact, et le sens de la composition approximatif, mais avec quelques riffs plus costauds (« Scorch the Earth ») et une sincérité qui flatte les tympans, Join, Or Die! est une petite merveille qui en plus est proposée cadeau sur le Bandcamp du groupe. Alors si un petit voyage dans le temps sans danger vous tente, ne ratez pas cette occasion. On n’est pas jeune qu’une seule fois !
Titres de l’album :
01. New Satanic Scripture
02. Sanity
03. Left to Rot
04. Join, or Die !
05. Scorch the Earth
Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)
16/09/2020, 22:12
16/09/2020, 21:49
15/09/2020, 22:30
15/09/2020, 22:06
gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)
11/09/2020, 12:32
Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???
11/09/2020, 10:59
Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)
11/09/2020, 08:04
Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...
11/09/2020, 07:25
Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)
10/09/2020, 21:27
Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)
10/09/2020, 11:22
J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)
10/09/2020, 11:18
L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.
10/09/2020, 09:45