Meraine

Meraine

30/09/2016

Moment Of Collapse Records

Il est d’usage de penser que les Allemands ont une conception du Hardcore chaotique bien à eux. Il suffit de se pencher sur quelques exemples, les ZANN ou AKELA pour en avoir une preuve tangible, mais il est certain que si les Américains ne sont pas les derniers à aborder le Hardcore par son versant le plus abrupt, nos cousins germains aiment les ascensions difficiles, piton à la main, et prêts à basculer dans le vide du chaos…qu’ils adorent remplir de sons, de cris, et de sonorités de guitare sans écho.

Je parlais d’AKELA qui visiblement n’enregistrera plus, ou du moins pas tout de suite, mais pour tous ceux que cette nouvelle attristerait, j’ai rassurez-vous un palliatif valide, à déguster toutefois en doses homéopathiques.

Les MERAINE viennent de Lüdenscheid, ville de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie, évoluent sous la forme d’un quatuor (Jan. Simon. Joti et Flo), et ont donc sorti leur premier longue durée à la fin du mois de septembre cette année. Ils proposent donc un prolongement des travaux d’AKELA, dont plusieurs membres viennent d’ailleurs, mais ont procédé à quelques ajustements pour honorer leur nouvelle direction, pas forcément radicalement différente de l’ancienne.

Si AKELA se permettait quelques digressions atmosphériques et mélodiques, l’extension de l’histoire via le prisme MERAINE s’est débarrassé des inserts trop prononcés harmoniquement, pour se concentrer sur la puissance abrasive d’un Hardcore vraiment teigneux et hargneux. On connaît plus ou moins la méthode qui parfois frise les délires du Post Hardcore, mais cette fois ci, admettons que l’école Allemande a souhaité une fois de plus propager son message aux institutions voisines, en prônant une certaine forme de nihilisme musical dénué d’empathie.

Et pourtant, paradoxe oblige, c’est le titre du morceau d’ouverture de ce LP éponyme. Sauf qu’en guise de générosité musicale, les MERAINE ont préféré l’expression radicale d’un Hardcore aux limites du Crust abrasif et corrosif, sans renier pour autant leur fascination convergente vers les moteurs UNSANE et DILLINGER. Rythme enlevé, chant hurlé, nombreux breaks cassés, et riffs qui se partagent entre tronçonnages graves et lacérations stridentes, usant du feedback et du silence comme pourraient le faire les PROTESTANT s’ils battaient pavillon CONVERGE.

En gros, énormément de véhémence sourde, typique de la pratique d’un certain Hardcore vénéneux outre Rhin, mais sans toutefois tomber dans le piège de la trop grande fidélité au genre. Des libertés ? Il y en a, peu, sous une forme larvée ou abstraite, mais appréhendez Meraine pour ce qu’il est. Un terrifiant album de Core très heurté, à la puissance sourde et à la vitesse de croisière parfois largement au-dessus de la moyenne du créneau (« Rusted Veins », qui joue avec le tempo de vos nerfs en prenant un malin plaisir à ralentir de façon presque aléatoire).

Tout ceci suffit-il à faire un bon album susceptible de se démarquer de la production globale ? Oui, puisque la qualité AKELA est toujours au rendez-vous, juste expurgée de ses tics les plus…empathiques.

La structure est simple d’apparence, avec une large bordée de morceaux courts et très percutants rythmiquement, ce qui reste la caractéristique principale des groupes de cette famille, pour terminer par deux segments plus développés qui ne sont pas pour autant moins radicaux.

Ainsi, « Abandon » qui débute sous les mêmes auspices que les tranches de violence précédentes, finit par s’égarer le long d’un Dark Ambient light mais grondant, dont la surface mouvante est à peine striée de quelques notes fantômes et de tremblements venteux assez inquiétants. Puis la quiétude finit par l’emporter sur l’inquiétude, et le long morceau se fond dans le final « Marrow », qui lui aussi se complait dans une sévérité instrumentale assez corsée, avant d’oser invoquer l’esprit défunt des AKELA, pour un long fade out final tirant sa révérence conjointe au « I Want You » des BEATLES pour sa spirale hypnotique, mais aussi aux étirements sombres des NEUROSIS de milieu de carrière, ceux qui n’hésitaient jamais à éprouver le silence d’une ambiance moite et onirique.

Mais avant d’en arriver à cette conclusion somme toute fort logique, il vous faudra vous ruiner les nerfs sur sept autres titres qui ne laissent pas plus de place à la relaxation qu’un discours de Fidel Castro. On pourrait les nommer tous et les envisager comme un bloc, mais chacun possède sa propre touche, même si les points communs sont nombreux.

Que le quatuor ose la pesanteur d’un Sludgecore à touches Indus (« Entropy », et son utilisation de samples très intelligente), qu’il se lance dans une course folle d’intensité, capable de laisser les CONVERGE sur le bord de la route (« Teeth », suintant de méchanceté bavant du Crustcore par tous les pores, « Limbs », aussi peu apte à renoncer à une origine d’appellation contrôlée déposée pourtant par les créateurs de Jane Doe), ou qu’il mette les pieds de chaque côté d’une frontière entre le Hardcore acide et le Crust aride (« Black Raven », un des plus effrayants du lot avec ses fantaisies rythmiques incessantes et ses énormes riffs en nuages d’orage), prouve que le Hardcore Allemand n’a rien perdu de sa brutalité inventive, qui peut parfois sembler un peu excessive dans la douleur, mais toujours pertinente dans le malheur.

Plus vraiment de quoi regretter la fin de l’aventure AKELA, puisque MERAINE en est presque la réincarnation. Certes, les chaînes du fantôme trainent encore un peu dans les couloirs du château, mais le quatuor nouveau à su extraire la quintessence de son ancien ensemble pour la rendre encore plus létale.

Du Hardcore chaotique, du Crust frénétique, un ballet de violence à outrance qui rappelle le meilleur des enseignements US traités avec une rigueur toute germanique.

Violent mais parfois apaisant comme dans l’œil du cyclone, déstructuré à vous en donner la nausée, mais cathartique d’une certaine façon.

 A voir en live, pour en apprécier d’autant plus la débauche de colère. Mais la colère est saine, et c’est un exutoire comme un autre.


Titres de l'album:

  1. Empathy
  2. Teeth
  3. Entropy
  4. Limbs
  5. Rusted Veins
  6. Black Raven
  7. Floatage
  8. Abandon
  9. Marrow

Bandcamp officiel

par mortne2001 le 19/11/2016 à 17:52
70 %    743

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Test de nouvelle vidéo

grinder92 11/09/2020

Vidéos

From This Day Forward

mortne2001 10/09/2020

From the past

...And Justice For All

mortne2001 08/09/2020

From the past

Slayer + Megadeth 2011

RBD 05/09/2020

Live Report

Manifest Decimation

mortne2001 31/08/2020

From the past

Opeth 2006

RBD 29/08/2020

Live Report

Widespread Bloodshed/Love Runs Red

mortne2001 24/08/2020

From the past

PILORI / Interview

Baxter 18/08/2020

Interview

Dead can Dance 2013

RBD 15/08/2020

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
grinder92

Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)

16/09/2020, 22:12

grinder92

 

16/09/2020, 21:51

grinder92

16/09/2020, 21:49

grinder92

  Affichage des smileys

16/09/2020, 16:48

grinder92

 

16/09/2020, 15:51

grinder92

15/09/2020, 22:30

grinder92

15/09/2020, 22:06

grinder92

  

15/09/2020, 19:09

grinder92

 

15/09/2020, 18:39

grinder92

 

15/09/2020, 18:38

grinder92

Affichage de Smileys  

15/09/2020, 13:57

grinder92

test de fonctionnement

15/09/2020, 13:57

senior canardo

gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)

11/09/2020, 12:32

Humungus

Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???

11/09/2020, 10:59

Living Monstrosity

Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)

11/09/2020, 08:04

Humungus

Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...

11/09/2020, 07:25

RBD

Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)

10/09/2020, 21:27

Arioch91

Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)

10/09/2020, 11:22

Arioch91

J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)

10/09/2020, 11:18

Nubowsky

L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.

10/09/2020, 09:45