A Game You Cannot Win

Heretic

27/10/2017

Dissonance Productions

Revenons un peu sur cette seconde division US qui a agité les clubs américains durant les années 80. Ces éternels espoirs, pas forcément plus mauvais que les autres, mais aux capacités de composition soi-disant un peu moins prononcées…Les sempiternels FLOTSAM & JETSAM, VICIOUS RUMORS, ARMORED SAINT, LAAZ ROCKIT, PARADOX, qui de leurs albums de Metal mordant ont animé bien des soirées à apprécier leurs œuvres pour ce qu’elles étaient. Des témoignages assez fidèles de la transposition d’un Heavy européen dans un contexte Thrash d’outre-Atlantique, les maîtres du genre…On se rappelle avec tendresse de ces LP qui n’avaient pas de quoi rivaliser avec les pierres angulaires, qui ont parfois mal vieilli, mais sur lesquels nous posons toujours une oreille attendrie…

Certains sont tombés dans l’oubli, d’autres ne l’ont jamais quitté, mais certains se sont battus contre le destin pour essayer de le faire tourner en leur faveur, et à celle d’une réunion censée corriger certaines erreurs de jugement. Pour autant, faut-il tout accepter au nom de la nostalgie et des souvenirs enfouis ? Pas forcément, puisque si ces dits groupes n’ont jamais émergé comme les leaders qu’ils n’étaient pas, c’est qu’il y avait parfois d’excellentes raisons à cela. Une banalité un peu trop flagrante, un refus de se conformer aux us de l’époque, et surtout, une certaine complaisance, et une foi un peu trop aveugle en des thèmes usés et pas forcément fédérateurs qui les confinaient dans un semi anonymat que seul l’underground pouvait contester.

Prenons le cas concret des sympathiques HERETIC. Formé en 1985, ce quintette (Julian Mendez – chant, Bobby Marquez et Brian Korban – guitares, Dennis O’Hara – basse et Rick Merrick – batterie) roda d’abord son répertoire, avant de proposer son premier EP, Torture Knows No Boundary, suffisamment éclairé pour allumer la veilleuse de Metal Blade. L’indépendant fut assez impressionné pour cautionner l’enregistrement d’un LP complet, qui fut finalement lâché sur le marché en 1988, sous la forme d’un Breaking Point à la pochette pas vraiment inspirée, mais au Metal affirmé. Trois ans après leur premier EP, les originaires de L.A, ville assez imperméable à la cause Heavy/Thrash (pas assez Glam ma chère…) expérimentaient un premier changement de line-up en confiant le micro à Mike Howe, futur METAL CHURCH le temps de trois albums pas forcément mauvais. D’ailleurs, ce départ inopiné déclencha la fin des hostilités, le combo préférant splitter plutôt que de s’adapter, certainement confronté à pas mal de problèmes d’adhésion d’un public déjà passé à autre chose…

La suite, on la connaît, les survivants se regroupant pour fonder REVEREND, avec…David Wayne de METAL CHURCH au chant, laissant leur créature d’origine mourant dans l’indifférence la plus totale. Difficile à l’époque de penser qu’un jour elle renaîtrait de ses cendres pour tenter de revenir sur un devant de scène qu’elle n’avait jamais vraiment occupée…Et pourtant, en 2012, un nouvel album entérina le comeback, A Time of Crisis, via une formation légèrement remaniée, mais toujours menée par Julian Mendez, le vocaliste des débuts, et l’infatigable Brian Korban, toujours solidement sanglé à sa guitare. Et puis, une fois encore, le silence…Cinq années d’absence, pour une nouvelle nécrologie en gestation, avant qu’HERETIC ne prenne les devants pour ne pas se faire enterrer prématurément.

Pas de larmes ni de soupirs, les californiens sont donc de retour une fois encore pour le meilleur et pour le pire, les riffs affutés et le chant lyrique enflammé. La configuration a encore évolué, et le quintette se présente aujourd’hui avec dans les rôles principaux les immanquables Julian Mendez et Brian Korban, secondés par Stuart Fujinami à la seconde guitare, Angelo Espino à la basse et Ignazio Iggy Coppola à la batterie. Ce sang neuf leur a-t-il apporté l’énergie nécessaire pour nous faire headbanguer comme de bon gros thrasheurs invétérés ? Oui et non, ce troisième album ayant une fois de plus les défauts de ses qualités, mais se présente quand même comme l’une des meilleures réalisations d’un groupe salement entêté. On y retrouve ce Crossover magique entre Power, Thrash et Heavy, pour un ballet de violence somme toute assez modérée, qui n’empêche toutefois pas de se déhancher au rythme de petites pépites Heavy Thrash bien troussées. Les ingrédients sont toujours les mêmes, et la confrontation entre puissance et mélodie est toujours aussi bien équilibrée, et il est même fort possible que ce troisième chapitre convertisse quelques brebis égarées qui n’auraient pas vu le train passer il y a trente années. Difficile toutefois de ne pas comparer les natifs de L.A à d’autres acteurs de l’époque, tant leur musique singe les meilleures grimaces d’OVERKILL ou d’ARMORED SAINT, tout en se montrant un poil plus convaincant que d’ordinaire. C’est un peu lourd quand on veut que ça décolle, un peu trop bordé d’harmonies quand la férocité devrait se mettre à la colle, mais le ratio entre subtilité et violence est souvent probant, à l’image de ce féroce et Heavy « Before The Fall », qui retrouve avec flair l’esprit Thrash N’Heavy de la Californie des 80’s à l’agonie, soli à l’appui, et rythmique bien féroce toisant le destin ennemi. Efficaces, les HERETIC le sont toujours, à défaut d’être vraiment créatifs, et on se laisse convaincre par une grosse poignée de compos qui ont le vent dans le dos.

Las, une fois encore, quelques petits détails viennent atténuer l’euphorie qui aurait pu être générale. D’abord, le chant de Julian, un peu trop forcé dans les tics dramatiques, et qui rappelle les démangeaisons les plus critiques de Joey Belladonna, plutôt que les cris hystériquement virils de David Wayne. D’autre part, la longueur excessive d’un album qui aurait gagné à être condensé, pour nous épargner quelques longues minutes de redite, pas forcément nécessaires. Avec cinquante-deux minutes au compteur, A Game You Cannot Win ressemble en effet à une mise que le quintette ne peut pas remporter, tant les idées se répètent pour parfois franchement agacer, lorsque les motifs proposés ne sont pas plus accrocheurs qu’un inédit de LAAZ ROCKIT très justement occulté (« Never Added Up »). Mais avec une jolie doublette d’intro, qui ne ménage ni les syncopes ni les poses de guitar-hero (« This World Called Hell »/ « A Game You Cannot Win »), ce troisième LP ménage quand même des surprises qu’on ouvre avec plaisir, même si les thématiques de six-cordes sont réutilisées à intervalles un peu trop réguliers (« Demonized », efficace, mais calqué). Ces surprises émergent souvent d’un tempo un peu plus audacieux (« Master At Her Game », hargneux mais précieux), ou au contraire, d’une linéarité d’apparence qui laisse apparaître la nostalgie en transparence (« Annihilate », simple comme un Heavy Thrash d’antan, mais efficace et rentre-dedans, basse en avant). On se surprend même à penser à un METAL CHURCH subtilement honoré (« Broken Hero », qui n’aurait pas démérité sur un The Dark célébré), même si le final à l’intitulé plein d’ironie vient nous rappeler que rien ne peut vraiment changer, et qu’il vaut mieux l’accepter (« Everything’s About To Change », pas vraiment mais comme l’ombre d’ARMORED SAINT plane dans le noir, on veut bien faire semblant d’y croire…)…

Il est fort peu probable qu’A Game You Cannot Win permette à HERETIC de passer une étape cruciale et de franchir le fossé qui le sépare des artistes les plus respectés. Mais en substance, il est inutile de nier que ce troisième LP est l’un des plus concis de leur carrière en pointillés, et qu’il saura contenter les fans d’un Heavy/Thrash rondement découpé. Pas de quoi transformer un hérétique en croyant, mais largement de quoi festoyer en souvenir des riffs d’antan.


Titres de l'album:

  1. Intro
  2. This World Called Hell
  3. A Game You Cannot Win
  4. Demonized
  5. Broken Hero
  6. Never Added Up
  7. Relentless
  8. Before The Fall
  9. Master At Her Game
  10. Immaculate Deception
  11. Annihilate
  12. Everything's About To Change
  13. Outro

Site officiel


par mortne2001 le 27/10/2017 à 14:45
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