Creatura

Ovo

09/12/2016

Dio Drone

Le type même de projet qui ne laisse personne indifférent…Une forme d’expression qui rebute, qui séduit, qui fascine ou qui au contraire suscite une répulsion, et ce, depuis les débuts de cet improbable duo à l’orée des années 2000…

OvO, c’est un duo, mixte, avec Bruno Dorella d’un côté, animateur rythmique, et Stefania Pedretti (et son autre projet solo ?ALOS) de l’autre, manipulant les cordes et la voix.

Un projet duo qui a émergé en 2000, et qui n’a eu de cesse de produire, des disques évidemment, seul ou en collaboration avec des artistes de renom (HERMIT, K.K NULL, TREMOR, ROLLERBALL, et des dizaines d’autres), mais aussi des performances live par centaines, foulant les scènes en compagnie de Thurston Moore, LIGHTNING BOLT, WHITE MICE, BASTARD NOISE, THE BODY, et plus encore…Une réputation sans faille de figure de l’underground Noisy et Indus, une discographie pléthorique, et surtout, une aura de mystère qui entoure leur musique, qui est plus que musique finalement. Une quête. De celles qui repoussent les limites et les brouille entre l’électronique et le Rock, entre le Noise et la musique, entre l’abstrait et le concret…

Cette discographie s’était soudainement mise sur pause après le formidable Abisso, proposé en 2013 et publié par le label Supernatural Cat, mais qui aujourd’hui en ce froid mais beau mois de décembre, trouve un nouvel élan grâce à la parution de Creatura, créature qui voit enfin le monde après trois ans de gestation, pour tenter de trouver le fameux équilibre entre expérimentation, musique libre, Metal, Rock, Noise, Indus, électronique et disons-le, un certain sens de la provocation et du libre arbitre.

Je le disais, la musique d’OvO ne laisse personne indifférent. Elle provoque les sens en triturant les sons, mais ne se contente pas de rester collée à des principes établis, qu’elle prend justement un malin plaisir à bousculer pour trouver de nouveaux chemins à explorer.

Si les thèmes d’Abisso trouvent ici un indéniable écho, Bruno et Stefania poussent le concept quelques mètres musicaux plus loin, pour offrir à leur parcours une nouvelle étape patente et déviante… 

Enregistré par Lorenzo Stecconi dans un hangar réservé aux compagnies de théâtre, mixé par Giulio Favero, Creatura s’est basé sur un tapis de rythmiques électroniques en boucle tricoté par Bruno, qui a patiemment assemblé les loops et beats, sur lesquels Stefania a pu s’exprimer avec sa guitare et sa basse, confrontant ainsi de plein fouet – et comme d’habitude -  le monde du Rock et de l’électronique, sans pour autant ressembler à ce qui s’est fait précédemment. Car depuis dix-sept ans maintenant, l’approche du duo Italien est unique et inimitable, et Creatura ne fait qu’entériner cet état de fait. On retrouve cette fois-ci sur l’album des sons enregistrés par Stefania lors d’une tournée au Vietnam, mais aussi des partenariats avec des musiciens comme Stefano Ghittoni (DINING ROOMS), Riccardo Gamondi (UOCHI TOKI) ou encore Garaliya (MORKOBOT), venus saupoudrer leur grain de sel sur le grain de folie ambiant. Ambient, c’est le mot, si le Dark Indus pointe souvent le bout de ses ténèbres, la musique d’OvO garde cette emprunte dansante digne de la scène EBM des nineties, et parvient à séduire tout en restant animal et terriblement froid à la fois.

La structure même de l’album, très intelligemment agencé de morceaux courts et d’interventions plus développées intrigue et provoque, tout autant que sa juxtaposition de sons durs et de parties rythmiques plus souples. La voix de Stefania, traitée et très robotique met l’emphase sur le « décomfort » sans pour autant rester allusive ou décorative, et s’intégrant parfaitement aux déroulés synthétiques de Bruno qui eux aussi, sont savamment ajoutés les uns aux autres pour former de véritables odes au bruit industriel mécanique.

Mais là est la méthode d’usage usitée par le duo depuis presque vingt ans, et Creatura ne déroge aucunement à cette règle.

On sent les influences de quelques combos, dont GODFLESH évidemment, pour cette fausse rigidité finalement très groovy, mais aussi la rugosité de FRONTLINE, et même quelques allusions aux vieux SWANS, à la déconstruction de PSYCHIC TV, voire au nihilisme expressionniste des THROBBING GRISTLE dans les instants les plus déconstruits et faussement libres…

Beaucoup de noirceur, mais aussi des rais de lumière aveuglants, et une confrontation entre espaces négatifs (nombreux), et espaces positifs (souvent salvateurs), sans perdre cette oppression et cet étouffement qui transforment des morceaux comme « Freakout » en bande son de l’horreur quotidienne qu’on a de plus en plus de mal à supporter.

En floutant les limites entre Rock et musique électronique, Creatura s’inscrit parfaitement dans la démarche logique d’OvO depuis Assassine, et surtout depuis Miastenia, et se pose en suite tout à fait logique d’Abisso, tout en y apportant de nouveaux éléments.

Si les stridences parsemées peuvent évoquer le spectre palpable d’un Alec Empire, si quelques constructions suggèrent un parallèle avec des groupes comme KHANATE, l’identité du duo s’affirme comme toujours, et même si quelques critiques ont cru voir en OvO une forme d’impasse de ressenti basée sur une utilisation systématique de sons glacés et d’exercices rythmiques un peu stériles, j’y ai vu moi-même une forme d’absolu, comme une anti-musicalité répétitive dont justement émergerait une indéniable forme d’humanisme sous-jacent.

Il est évident que de longs segments comme « Matriarcale », assez linéaire dans des prises de positions rythmiques et ses incarnations vocales cauchemardesques, ou « Buco Bianco », qui suit peu ou prou le même schéma en restant bloqué sur un beat rigide et hypnotique, salement lardé de fréquences graves et d’arrangements spectraux, pourront irriter et emmener à tort sur le chemin du dédain.

Il est sur aussi que la fausse conclusion en pied de nez « March of The Freaks » et son shunt violent et inopiné frustrera les plus exigeants, mais dans la forme et le fond, Creatura est cohérent, et fait vraiment avancer les théories de ce duo qui sait parfaitement où il va, et pourquoi.

La violence sourde atteint même une sorte d’apogée sur des lacérations bruitistes comme le morceau éponyme, véritable délire nocturne peuplé de samples monstrueux et de symphonies de l’étrange, trouvant un écho positif et encore plus dantesque sur « Freakout », et finalement, Creatura est bien une bête étrange, immonde pour certains, née de l’union entre les couches électroniques sombres de Bruno et l’expressionisme cru de Stefania, couple Frankenstein par excellence, qui brasse des décennies d’influence Indus, Darkwave, Metal froid et EBM torturé…

Une suite qui offre des perspectives, certes assez peu joyeuses sur un plan harmonique, mais délicieuses sur le terrain de l’expérimentation sonore.       

 Des abysses a surgi cette créature pluriforme. Mais oserez-vous la regarder dans les yeux pour y voir votre propre reflet ?


Titres de l'album:

  1. Satanam
  2. Eternal Freak
  3. Creatura
  4. Matriarcale
  5. Zombie Stomp
  6. Buco Nero
  7. Buco Bianco
  8. Immondo
  9. Freakout
  10. Bell's Hell's
  11. March Of The Freaks

Site officiel


par mortne2001 le 26/12/2016 à 14:56
75 %    778

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Test de nouvelle vidéo

grinder92 11/09/2020

Vidéos

From This Day Forward

mortne2001 10/09/2020

From the past

...And Justice For All

mortne2001 08/09/2020

From the past

Slayer + Megadeth 2011

RBD 05/09/2020

Live Report

Manifest Decimation

mortne2001 31/08/2020

From the past

Opeth 2006

RBD 29/08/2020

Live Report

Widespread Bloodshed/Love Runs Red

mortne2001 24/08/2020

From the past

PILORI / Interview

Baxter 18/08/2020

Interview

Dead can Dance 2013

RBD 15/08/2020

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
grinder92

Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)

16/09/2020, 22:12

grinder92

 

16/09/2020, 21:51

grinder92

16/09/2020, 21:49

grinder92

  Affichage des smileys

16/09/2020, 16:48

grinder92

 

16/09/2020, 15:51

grinder92

15/09/2020, 22:30

grinder92

15/09/2020, 22:06

grinder92

  

15/09/2020, 19:09

grinder92

 

15/09/2020, 18:39

grinder92

 

15/09/2020, 18:38

grinder92

Affichage de Smileys  

15/09/2020, 13:57

grinder92

test de fonctionnement

15/09/2020, 13:57

senior canardo

gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)

11/09/2020, 12:32

Humungus

Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???

11/09/2020, 10:59

Living Monstrosity

Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)

11/09/2020, 08:04

Humungus

Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...

11/09/2020, 07:25

RBD

Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)

10/09/2020, 21:27

Arioch91

Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)

10/09/2020, 11:22

Arioch91

J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)

10/09/2020, 11:18

Nubowsky

L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.

10/09/2020, 09:45