Fatal Visions

Inculter

12/04/2019

Edged Circle Productions

Voici donc une nouvelle horde de barbares se réclamant d’une nostalgie patente, et pourtant, j’entamerai cette chronique en les contredisant. Car si leur page Facebook mentionne avec fierté le label Blackened Thrash, l’écoute de cette seconde galette me conforte dans l’idée que ces jeunes chiens fous jouent du véritable Thrash, malgré une férocité de ton indéniable et une bestialité d’interprétation appréciable. Mais on ne peut leur en vouloir d’avoir galvaudé une appellation, puisque ce deuxième tome de leurs aventures s’éloigne assez finement de leurs instincts primaires, que nous avions eu la chance de découvrir il y a quatre ans déjà. A l’époque, les INCULTER, même pas encore parvenus à la vingtaine, laissaient parler des influences de jeunesse et se laissaient aller à une brutalité outrancière, avant de découvrir qu’un peu de finesse ne pouvaient leur nuire, bien au contraire. Et c’est donc une professionnalisation incontestable que Fatal Visions présente à la face du monde, et avec ces huit nouveaux titres en poches, le quartet a largement de quoi se faire une place sur la scène déjà surchargée des amateurs de vintage prononcé. Fondé en 2012 du côté de Fusa, Norvège, INCULTER est le prototype même de groupe fondé pendant l’adolescence, qui n’avait d’autre but à l’origine que de servir d’exutoire à la violence intérieure, mais aussi d’hommage aux pères fondateurs, que l’on situait alors du côté de l’Amérique du Sud. Impossible en effet en 2015 en tendant les oreilles sur Persisting Devolution de ne pas avoir pensé aux icônes de SARCOFAGO, SEPULTURA et autres ATTOMICA, références majeures d’un Thrash assombri et encore impoli, qui n’avait cure de la précision et de l’affûtage en rayon. Sauf que le temps passant, et la maturité aidant, les musiciens ont découvert que la pratique d’un instrument pouvait permettre d’affiner son sens de la composition, ce que Fatal Visions suggère jusqu’au bout de ses sillons.

D’ailleurs, une analyse rapide de l’œuvre permet de la ranger dans la catégorie des « plus de et moins de ». Plus de finesse, plus d’agencement, moins de bordel et moins d’effusion de sang. Pour autant, ne croyez pas ces quatre-là (Cato Bakke - basse, Daniel Tveit - batterie, Remi - guitare/chant et Lasse Udjus - guitare) rangés des voitures volées, puisque l’intensité de cette grosse demi-heure prouve qu’ils n’ont pas l’intention de se calmer, juste de peaufiner un peu plus leurs attaques pour les rendre plus efficaces. Et en bénéficiant d’un sacré coup de main d’Herbrand Larsen (ENSLAVED) au mastering, étoffant une production et un mixage soigné par le groupe lui-même, Fatal Visions se pose facilement en révélation de ce mois d’avril, pourtant très chargé en sorties imposantes. Grâce à quoi ? Des riffs qui foncent bille en tête mais après avoir été expurgés de toute scorie, une rythmique infatigable multipliant les breaks, les roulements et les figures sans s’égarer dans le tempo, et un chanteur au timbre sans écho, mais ferme. En résultent donc huit titres qui fouettent, qui sentent bon le Thrash bestial de la fin des années 90, en version plus polie mais toujours aussi grossière dans le fond. On pense encore donc à la production brésilienne de la fin des eighties, mais aussi à la vague Death Thrash californienne ou pas de la même époque, INCUBUS en tête, avec des relents de HEXX, et de vagues remontées gastriques d’INFERNAL MAJESTY, pour un bain d’acide qui fait du bien aux batteries.

En gros, ça mule, mais intelligemment, ça brûle, mais sans être trop fondant, ça infecte, mais avec le style, et ça défouraille, mais avec classe. On sent clairement que les quatre dernières années ont été mises à profit, et que la rythmique composée de membres de REPTILIAN et SEPULCHER, deux autres combos nationaux n’a pas laissé sa pratique au vestiaire. Alors évidemment, les plus pointilleux argueront du fait que les lignes vocales, que les à-coups rythmiques peuvent encore s’affilier au Blackened Thrash, comme avant, mais je ne peux m’empêcher de voir dans cette progression une façon de s’éloigner de ce genre trop fourre-tout et sommaire. Linéaire comme tout bon album lapidaire qui se respecte, Fatal Visions n’en est pas pour autant roboratif, et son ambiance lusophone transposée dans un froid hivernal norvégien prend à la gorge, dès « Open The Tombs », qui effectivement, semble ouvrir les portes d’un vieux cimetière de Fusa, libérant ainsi des vents glaciaux post-mortem. A cheval entre l’âge d’or du Thrash de la période 89/90 et les prémices d’un Death scandinave plus accessible, ce second LP est plutôt fort de café, mais contient suffisamment d’idées pour séduire les maniaques de la violence d’il y a deux ou trois décennies. Inutile d’attendre une quelconque baisse de régime, puisque les morceaux s’enfilent comme à la grande époque, dans une sorte de ballet outrancier à la Reign In Blood, sans évidemment en atteindre le génie. Mais on craque pour cette franchise, pour ces riffs à l’allemande (« Impending Doom »), pour ces soudaines décélérations très Death et limite Doom (« Endtime Winds »), mais aussi pour ces quelques mélodies perdues sur le chemin (particulièrement notables sur les soli, très respectables).

Et malgré des impression de déjà-entendu, malgré des BPM qui semblent vouloir garder le cap à tout prix, malgré un chant qui pourra sembler hésitant et un peu timide aux amateurs de régurgitation vocale, malgré parfois quelques réminiscences un peu flagrantes des meilleurs travaux des RECIPIENTS OF DEATH (« Fatal Visions »), on se laisse entraîner dans cette folie presque furieuse, et juste assez sérieuse pour ne pas passer pour de la simple paraphrase malhabile. Ajoutez à ce bilan largement positif un superbe et sobre artwork signé R.K. Valbo (OBLITERATION, VOID EATER), un son sec et sans pitié, pas mal de flair sur les transitions, et beaucoup de conviction, et vous obtenez une suite certes classique, mais beaucoup moins que celle des voisins. Une façon de prendre ses distances tout en assumant ses passions, et en délivrant aux headbangers leur dose d’exercice à l’occasion. Belle démonstration, et on sent que les INCULTER ont largement le potentiel pour franchir une autre division, et passer du côté des leaders de la nouvelle génération.    

   

Titres de l'album :

                           1. Open The Tombs

                           2. Impending Doom

                           3. Shepherd of Evil

                           4. Endtime Winds

                           5. Final Darkness

                           6. Towards the Unknown

                           7. Fatal Visions

                           8. Through Relic Gates

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par mortne2001 le 18/05/2019 à 14:24
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