Heads Have Got To Rock'n'Roll

Magick Touch

26/06/2020

Edged Circle Productions

Je me délectais hier soir de l’excellent film Eurovision Song Contest - The Story of Fire Saga, reproduisant à merveille tout le clinquant et le kitsch de cette compétition, et mon imagination vagabondait. Revoyant les images d’un LORDI triomphant, je me disais en mon for intérieur que si les suédois, les norvégiens, les finlandais et les islandais se décidaient à envoyer la même année leurs compétiteurs Hard-Rock les plus affirmés, la compétition tournerait au massacre tant ces pays nordiques ont affirmé leur suprématie sur la nostalgie ces dernières années. Ces hordes mélodiques ont débarqué sur les côtes mondiales comme des Vikings venant tout piller sur leur passage, et il semblerait qu’aucune armée mélodique ne soit capable d’arrêter leur avancée, ni même de la ralentir. Cela dit, le choix des suédois quant à leur concurrent serait difficile et opter pour GHOST, NIGHT FLIGHT ORCHESTRA ou ROYAL REPUBLIC serait un dilemme incroyablement difficile, mais les norvégiens auraient quant à eux une évidence trop claire pour être niée. En effet, avec la présence de MAGICK TOUCH sur la scène de ce concours un peu désuet mais toujours aussi fédérateur, l’affrontement aurait des allures de bataille gagnée d’avance. Car à l’image sonore de leurs homologues, ces musiciens passionnés par les années 80 n’ont pas leurs instruments dans la poche ni la mélodie dans le placard, et au moment de négocier le virage de leur troisième album, ces pilotes de la nostalgie old-school n’ont pas ralenti le rythme et opté pour une vitesse de croisière plus raisonnable. Toutefois, la pochette de Heads Have Got To Rock'n'Roll peut tromper, et faire croire à un Heavy Metal passéiste, fortement influencé par la NWOBHM, alors que ce nouvel album n’est rien de plus qu’un nouveau concentré de Hard-Pop comme seuls les habitants du froid peuvent les concevoir. Et sans surprise, cette nouvelle livraison est une nouvelle réussite à mettre au compte d’une partie du monde qui ne vit plus musicalement que pour le souvenir.

Stricto-sensu, ce nouveau LP n’est pas vraiment du Rock N’Roll, sauf quand il en adopte les tournures bluesy sur « Ready for the Quake ». On sent à ce moment-là que les musiciens ont bien compris que pour appréhender le Hard le plus commercial et abordable, il faut en comprendre ses racines bluesy. Mais c’est surtout la Pop qui intéresse ces lascars, une Pop durcie, clairement influencée par les maîtres du genre THIN LIZZY, qui eux aussi parvenaient à jouer dur sans renoncer à la souplesse des harmonies. Même rythmique souple et ronde, même chant un peu soft qui met en valeur les idées les plus caressantes, même facilité à pondre des hymnes sans avoir à débattre de questions de crédibilité. Et après Electrik Sorcery en 2016 puis Blades, Chains, Whips & Fire en 2018, les MAGICK TOUCH n’ont eu besoin que de deux années pour continuer d’écrire leur légende, en proposant à leurs fans exactement ce qu’ils avaient envie d’entendre : un album ancré dans un passé que tout le monde semble regretter, et qui aligne les tubes comme un juke-box tombé du paradis, et calé sur des singles que tout le monde reprend en chœur. Evidemment, rien de surprenant per rapport aux deux premiers albums de la bande, toujours la même facilité à pondre des hymnes comme une poule surproductive, toujours la même capacité à agencer leurs morceaux pour les rendre inédits alors qu’ils ne sont que des modulations sur des thèmes anciens, et toujours cette aisance déconcertante à singer les tics de THIN LIZZY dans un contexte plus malléable. Ainsi, difficile de croire que « Bad Decisions » n’a pas été composé par Phil Lynott pour les 220 VOLT, ou que « (This isn't) Your First Rodeo » n’a pas été prêté par SAXON pour que les NIGHT FLIGHT ORCHESTRA prennent leur pied un samedi soir. Le son, toujours aussi cool nous entraîne sur une route imaginaire aplatie entre la Norvège et la Californie, en passant par l’Angleterre du renouveau Heavy Metal de l’orée des eighties, l’autoradio à fond la caisse pour laisser les cheveux planer dans le vent sous le regard hagard des piétons contaminés par l’euphorie absolue de ce fameux « (This isn't) Your First Rodeo », sorte de « Dallas 1PM » pour une génération n’ayant pas connu le big-bang à temps.

Dix titres, quarante-trois minutes, l’effort est une fois de plus mesuré, mais comparé à ses homologues directs, MAGICK TOUCH se permet une diversité dont HAUNT ne peut que rêver. Chaque chanson semble aborder une fissure temporelle différente, faisant allusion à l’euphorie de seventies encore libres, ou à la radiophonie des années 80, lorsque le Billboard cherchait à tout prix le meilleur compromis entre l’énergie et la séduction (« Watchman's Requiem »). Plus qu’un simple troisième album, Heads Have Got To Rock'n'Roll est une tentative d’évasion d’un monde trop morne, mais qui se satisfait très bien d’avoir encore AC/DC et ses disciples pour supporter la routine (« To the Limit »). En écoutant ces titres qui défilent, on pense au KIX de Cool Kids transposé dans le froid d’un hiver norvégien, et cherchant par tous les moyens à se réchauffer dans un bar du vendredi soir. Loin de répéter des recettes déjà énoncées sur les deux albums précédents en changeant juste un ou deux ingrédients, les trois acolytes (Bård Heavy Nordvik, HK Rein, Christer Ottesen) poussent la passion dans ses derniers retranchements, et sonnent parfois plus cru d’un Hard qui ne se dilue pas, et lâchent un furieux « Love is a Heart Disease » d’une voix rauque et d’une guitare conquérante. Ce qui est merveilleux et sidérant à la fois, c’est que ce genre de disque se permet une perfection que peu d’artistes peuvent atteindre, surtout après quelques années de carrière. Il sonne aussi frais qu’aux débuts du groupe, et pourtant d’une maturité rare. La seule ballade de l’album est d’une émotion palpable, mais évite la niaiserie d’une copie-carbone de bluette pour bande-originale prévisible (« Phantom Friend »). Certes, je le reconnais ; le trio partage pas mal de points communs avec ses voisins, cette façon d’adoucir le son pour ne pas le rendre trop abrupt, ces concessions permettant d’intéresser un public hermétique au Hard Rock, et cette capacité à vampiriser tous les genres pour en créer un presque nouveau. Mais il y a chez les MAGICK TOUCH quelque chose de plus que chez les autres, une absence de concession linéaire, un refus des gimmicks trop faciles, et surtout, pas de synthé partout pour rendre les choses plus glissantes.

Le lubrifiant ici est le Rock, rien d’autre. Un Rock moyennement dur et agressif, un Rock qui accepte la brillance des néons eighties (« Daggers Dance »), un Rock qui peut se vouloir sentimental, mais qui en le faisant est lucide, et accepte l’héritage alternatif des nineties (« Doomsday I'm in Love »). En gros, quelque chose de similaire, mais de différent. Peut-être un truc capable de remplacer l’imputrescible « Waterloo » d’ABBA, et poser la couronne de l’Eurovision sur la bonne tête. Mais essayons pour voir, envoyons les MAGICK TOUCH participer à la compétition, sans danseurs, sans effets spéciaux et costumes ridicules. Après tout, pourquoi pas ?                       

                                                                 

Titres de l’album :

01. (This isn't) Your First Rodeo

02. Watchman's Requiem

03. To the Limit

04. Love is a Heart Disease

05. Ready for the Quake

06. Bad Decisions

07. Phantom Friend

08. Waiting for the Parasites

09. Daggers Dance

10. Doomsday I'm in Love


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par mortne2001 le 27/01/2021 à 17:20
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