Si je vous parle de la Californie, de violence musicale, et de tronches un peu patibulaires, vous allez certainement penser à des images très figées, vous ramenant directement aux sacro-saintes années 80, et vous n’aurez pas tort. Mais si l’histoire a retenu les excès de 83/84, elle n’en a pas pour autant oublié de continuer sa propre légende en observant l’exploitation de l’héritage laissé en pâture par les grandes figures. Cet héritage est mis à profit chaque jour que Satan fait, et la déferlante de Metal extrême vintage que nous subissons chaque jour est là pour en témoigner.
Et au cas où tout ça ne vous suffirait pas, j’ai un autre exemple qui emboite le pas. Celui d’un quatuor de Los Angeles, formé en 2012, et qui vient tout juste de commettre son premier méfait, en longue-durée s’il vous plaît, SECTOR. Pas grand-chose à se mettre sous la dent, puisque depuis leurs débuts, rien n’a été livré niveau démo ou EP, et c’est donc par un grand bond que les californiens rentrent dans la cour des grands, via cet Odyssey Of Violence qui en effet, ne fait ni dans la dentelle ni dans les motifs ouvragés. Néanmoins, et aussi brutal soit-il, ce LP n’en est pas pour autant une orgie de décibels outranciers, mais bien un bel hommage aux héros du passé, ceux qui ont contribué à définir les règles de la brutalité, et dont les enseignements sont toujours autant appréciés. Derrière les masques se cachent donc Frank "The Tank" Campos (guitare/chant), Cesar "The Wizard" Estrada (guitare), Gabino "Gambit" Arellano (batterie) et Alejandro "Taliban" Lopez (basse), dont les pseudos « entre guillemets » en disent long sur leurs intentions, révélées assez tôt sur les sillons. De l’extrême donc, qui s’abreuve à la source du Thrash et du Death les plus primaires, sans pour autant négliger les finitions, pour nous offrir un album sinon parfait, du moins largement assez jouissif pour nous faire headbanguer.
L’appel à témoins concernera donc les fanatiques du riff circulaire et de la rythmique d’enfer, qui ne se contente pas d’égrener les BPM mais qui se montre aussi à l’aise en mid qu’en up, le tout survolé par un chant bien grognon aux cordes vocales ravagées par les champignons. Difficile de ne pas établir de références à l’écoute des huit morceaux qu’on nous balance, tant l’ombre de VENOM, de SEPULTURA (celui des débuts, sauvagerie oblige), de RAZOR et des BULLDOZER, ainsi que la vague teutonne des premiers éclairs qui tonnent de la sidérurgie locale (KREATOR via Endless Pain, SODOM), tout comme la déferlante sud-américaine des mid 80’s sont mis à l’honneur en un peu plus d’une demi-heure. Un travail sous influence donc, mais qui convainc de sa pertinence en n’oubliant pas la souffrance, celle d’une production plutôt opaque qui transcende des guitares du tac au tac, et d’un duo basse batterie soudé comme du fer forgé. Les titres du LP seraient d’ailleurs plutôt en acier, bien trempé, et inutile d'attendre très longtemps pour savoir ce qui nous attend, puisque « Malleus Maleficarum » prend les devants en se montrant bien rentre-dedans, développant en quatre minutes la quasi-totalité des arguments que les californiens vont présenter trente minutes durant. Des accélérations, des transitions, des guitares en oraison, et beaucoup de coups de médiator bien saccadés, mais aussi des ambiances travaillées, à mi-chemin entre Thrash fatal et Death létal, en penchant quand même du côté Bay Area où il va tomber.
Certes, en toute franchise, Odyssey Of Violence n’est pas le genre d’album à écouter si vous êtes avide de surprises et de bousculade créative, puisqu’il se contente de réciter à la lettre les anti-poésies de l’outrance apprises il y a déjà fort longtemps, mais il a l’avantage de le faire avec application, et avec ce petit brin de fantaisie bordélique que l’on apprécie. On y retrouve les rimes des auteurs extrêmes d’il y a trente ans, le nombre de pieds des rythmeurs de la même décennie, et les figures de styles plus ou moins imposées du genre. A savoir, des riffs qui découpent dans le lard, quelques allusions techniques discrètes mais notables, des effets sonores parcimonieux histoire d’agrémenter le quotidien, et pas mal de thèmes bien chafouins qui ruminent des naseaux, dans la grande tradition MORTAL SIN/RAZOR, soit un joli écart de rapidité et de brutalité pour nous maintenir éveillé. Pas mal de puissance, notamment sur les interventions les plus ambivalentes, dont « Nam ‘67 » n’est pas le moindre exemple, mais le plus court et l’un des plus efficaces. Pas difficile non plus de noter que le quatuor s’est parfois laissé embringuer dans des citations plus tardives, en reprenant à son compte la débauche de bestialité des premiers BATHORY (« Flesh And Steel », qu’on aurait pu trouver sur les premières démos de Quorthon), tout en avouant leur admiration sans bornes pour un Thrash mélangeant la précision d’un LIVING DEATH et la corruption d’un SODOM (« Brutality », nom direct pour compo impec’). Staccato, soli chauds, notes qui se répète et s’entremêlent (« Final Hour », médian, mais beat de titan), pour final épique qui entraîne (« The Flames (That Consume Your Soul) »), et qui achève sur des pointillés une première réalisation bien tournée, qui laisse présager d’un avenir convenu, mais qu’on suivra avec un sourire affiché.
Les prétentions des SECTOR sont humbles, mais leurs moyens sont indéniables. En optant pour une franchise de ton pas si simpliste qu’elle n’en a l’air, mais couverte par une production maison un peu brouillon, les californiens donnent le ton, et s’engagent à corps et cœur perdu dans cette odyssée de violence qui si elle joue avec l’outrance, ne tombe jamais dans le chaos rance. Des musiciens tout à fait capables, des titres qu’on écoute avec attention, pour un premier album classique dans le fond et puissant dans la forme. Un peu noyé dans le volume pléthorique de sorties mensuelles, ce LP aura sans doute du mal à s’y tailler une place, mais gageons qu’une fois vos esgourdes posées sur ce jet de bile Thrash, elles sauront s’y rassasier. Pas le genre de classique instantané, mais un truc honnête, qui ne perd pas de temps pour développer les arguments qu’il souhaite étayer.
Titres de l'album:
Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)
16/09/2020, 22:12
16/09/2020, 21:49
15/09/2020, 22:30
15/09/2020, 22:06
gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)
11/09/2020, 12:32
Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???
11/09/2020, 10:59
Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)
11/09/2020, 08:04
Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...
11/09/2020, 07:25
Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)
10/09/2020, 21:27
Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)
10/09/2020, 11:22
J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)
10/09/2020, 11:18
L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.
10/09/2020, 09:45