Le Death mélodique, en principe, j’évite. Oui, je fais partie de cette caste sauvage qui préfère son extrême brut et raw, sans fioritures, si possible old-school, avec de jolis grognements et des accélérations fatales. Alors les arabesques harmoniques sur fond de hurlante néo-scandinave, je laisse ça aux nostalgiques de la vague nordique des années 90, mais…puisqu’il y a un mais…je ne crache pas sur un brin de finesse lorsque la technique est au rendez-vous, et pas seulement pour flatter l’ego de musiciens déjà bien cajolés. C’est sans doute pour cette raison que j’ai un jour porté mon attention sur les anglais de HORRIFIED, qui avec Descent into Putridity avaient su montrer un visage grimaçant, mais étrangement séduisant. Sorti en 2014, ce premier album faisant montre de qualités indéniables dans le style, et s’était vu soutenu par deux autres sorties longue-durée, Of Despair en 2016 et Allure of the Fallen en 2017 qui ne faisaient que confirmer la bonne opinion ressentie dès le départ. Car l’approche des HORRIFIED est assez simple dans les faits, et moins complexe qu’il n’y paraît dans la forme. Prendre le Death par le plus gros bout de la lorgnette, en accentuer la finesse d’exécution, sans perdre en efficacité, soit appliquer les enseignements de l’école DEATH/ATHEIST sans tomber dans la démonstration gratuite et stérile. Et deux ans après leur dernière saillie, les anglais nous en reviennent donc avec un (long) EP de trente minutes, qui proposent six nouveaux chapitres aussi essentiels que les précédents. Une fois encore enregistré aux Subterranean Watchtower Studios avec l’aide de Damian Herring au mixage et mastering, Sentinel est donc une logique dans la continuité, mais surtout la preuve que le groupe a encore pas mal de choses à dire et d’expériences à tenter.
Sous sa pochette signée Adam Burke (SOLSTAFIR, GATECREEPER, TCHORNOBOG), Sentinel est une fois de plus un modèle d’équilibre entre sophistication et brutalité. Musicalement, les instrumentistes (Dan Alderson - guitare/chant, Dan Jordan - guitare, Lee Anderson - basse et Micheal Jordan - batterie) sont une fois encore au-dessus de tout soupçon, et se livrent à des joutes fabuleuses, sans se prendre pour des gladiateurs hi-tech. Le néophyte, n’ayant jamais encore tendu l’oreille sur le groupe sera certainement surpris de constater que deux guitares ont été chargées de l’accueillir, l’une acoustique, l’autre électrique en son clair, ce qui n’est pas la moindre des évidences en ces temps de violence. Mais on sait les originaires de Newcastle upon Tyne très attachés à leurs mélodies, qu’ils n’abandonneraient pour rien au monde. Et c’est ce qui fait leur unicité, puisque une fois encore, la direction artistique n’a pas changé de cap. Parvenir à trouver un terrain d’entente entre plusieurs styles différents, les faire cohabiter, sans perdre en cohésion. C’est donc tout naturellement que nous retrouvons ces inserts NWOBHM, Thrash, Doom, Epic Death, qui partagent le terrain sans empiéter sur celui de l’autre, avec des accélérations subites, des breaks ciselés, et des moments de furie incontrôlée. Ce qui risquera plus de choquer le nouveau fan éventuel est évidemment la voix très particulière de Dan Alderson, sourde, étouffée, noyée dans le mix et rauque, qui créé toujours ce décalage entre les parties instrumentales pures et des lignes de chant semblant hors contexte. Avec son timbre à la Simon Forrest de CEREBRAL FIX, Alderson peut en effet rebuter les plus exigeants et attachés à une logique harmonique, mais ce singularisme fait aussi le charme de HORRIFIED qui décidément ne fait rien comme tout le monde.
La donne n’a donc pas changé, et l’alternance est toujours de mise. On retrouve donc avec plaisir ces intros qui ne reculent devant rien pour imposer leur grandiloquence mélodique, ces allusions à la vague Heavy des mid eighties qui permettent au groupe de revendiquer cette fameuse étiquette de « Epic Death ». Avec une sublime production, analogique juste ce qu’il faut, « Awaiting Restitution » s’impose comme l’épitomé d’un genre presque nouveau, mélange entre un Death sans compromis de facilité à la ATHEIST/CYNIC/DEATH, de claque virtuelle mais gravissime à la HORRENDOUS, et de digression harmonique à la MANILLA ROAD, les aspirations techniques en plus, mais l’esprit conquérant similaire. On se laisse donc happer par cette épopée qui multiplie les couches de guitare, et qui laisse une basse incroyablement volatile et volubile occuper le premier-plan, comme une attache Jazz-Rock pas totalement assumée. On pense aussi à un UZEB isolé dans un monde à la BLIND ILLUSION, relisant un song-book de BLIND GUARDIAN, le tout sous l’œil bienveillant de Martin Birch. Mais attention, sous couvert d’une utilisation intensive de la modulation et de la douceur, le groupe est toujours à l’affut, et prêt à se lâcher dans la violence comme en témoigne l’intense « Crestfallen » qui ramènera au souvenir des fans de CARCASS leur période la plus Heavy, mais toujours méchante. Puissant mais subtil, ce nouvel EP aménage même des instants de grâce pure, sous la forme instrumentale, avec le fragile et délicat « Celestial Tears » qui nous permet une pause entre deux râles glauques de Dan Alderson. Et sans vouloir dévoiler toutes les astuces d’un groupe qui en connaît un bon paquet, je tiens quand même à préciser que le final « The Perceiver » peut représenter un point d’entrée synthétique parfait au monde des HORRIFIED, tant il résume à merveille leur philosophie. Véritable festival de savoir-faire, cet épilogue fait la part belle aux démonstrations collectives et individuelles, avec toujours cette basse qui semble vouloir suivre à tout prix les guitares, ces cassures mélodiques soudaines, et ces hurlements sourds en contrepoint.
En considérant Sentinel pour ce qu’il est, un relèvement des compteurs, le plaisir ressenti n’en est que décuplé. Avec ces trente minutes de violence en alternance, les anglais nous permettent de reprendre contact, et de continuer d’apprécier leur sens de la motivation et de l’innovation, et de rêver à une union fugace entre OPETH et ATHEIST, au détour des couloirs de l’histoire. La leur est toujours aussi passionnante et riche, et digne d’être suivie avec intérêt.
Titres de l’album :
01 The Pessimist
02 Awaiting Restitution
03 Crestfallen
04 Celestial Tears
05 Forgotten Thrones
06 The Perceiver
Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)
16/09/2020, 22:12
16/09/2020, 21:49
15/09/2020, 22:30
15/09/2020, 22:06
gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)
11/09/2020, 12:32
Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???
11/09/2020, 10:59
Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)
11/09/2020, 08:04
Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...
11/09/2020, 07:25
Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)
10/09/2020, 21:27
Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)
10/09/2020, 11:22
J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)
10/09/2020, 11:18
L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.
10/09/2020, 09:45