Suite 226

Serious Black

24/01/2020

Afm Records

Six ans d’activité, pour quatre albums longue-durée, il est clair aujourd’hui que le cas SERIOUS BLACK est une affaire sérieuse et pas un simple gimmick. Les amateurs de Metal mélodique joué Power le savaient déjà, leur groupe fétiche est une valeur montante, une étoile prête à exploser pour illuminer le ciel de son exubérance enflammée, et Suite 226 sera l’étincelle dont le combo avait besoin pour embraser les ténèbres. Et après Magic en 2017, Mirrorworld en 2015 et As Daylight Breaks en 2015, ce nouveau témoignage de la vitalité allemande est une véritable bouffée d’air frais dans le petit monde très fermé du Heavy Power européen, un peu trop recentré sur lui-même et ses certitudes. Première nouveauté pour les allemands, le choix du concept album, art hautement casse-gueule qui consiste à raconter une histoire homogène soulignée d’une musique ne l’étant pas moins. On attendait donc de ce nouveau chapitre une emphase renouvelée, un sens du lyrisme accentué, des arrangements larger than life, et une interprétation habitée. Et comme SERIOUS BLACK n’est pas du genre à faire dans la demi-mesure, le concept en lui-même à de faux airs d’opéra de l’étrange, sorte de Stephen King médiéval perdu dans les limbes du temps et de l’espace, alors même que le LP parle de…confinement. Le héros de cette histoire est comme vous l’avez deviné eu égard au titre enfermé dans la chambre d’un hôpital psychiatrique, mais s’imagine seigneur régnant sur son royaume au moyen-âge, ce qui a le mérite de se montrer original. Cette incongruité thématique, loin d’être grotesque est justement l’argument parfait qui permet au fou chantant Urban Breed de donner corps à une incarnation proportionnelle à son talent vocal, et autant dire que le chanteur s’en donne à cœur joie, vocalisant comme jamais. Et grand bien lui en a pris, ce genre de délire ne supportant que très peu la raison et la pondération, ce qui permet dès le départ à Suite 226 de respecter ses engagements tacites et de refuser la normalité la plus banale et triste.

Seconde surprise, moins bonne, le groupe a perdu en route quelques preux chevaliers, partis voir ailleurs si l’herbe repoussait moins vite. C’est ainsi que de sextet, le groupe est passé à une configuration classique de quatuor, avec la perte de Bob Katsionis et Alex Holzwarth, puis celle de Jan Vacik, le claviériste. Sur ces trois défections, une seule a été comblée, celle du batteur Ramy Ali (ex-FREEDOM CALL, IRON MASK), qui avait déjà joué avec le groupe il y a quelques années. C’est ainsi qu’aux côtés d’Urban et Ramy, nous retrouvons les habitués Mario Lochert (basse) et Dominik Sebastian (guitare), pour une configuration resserrée. Visiblement, cette épure de membres a permis au groupe de se ressourcer, et de se concentrer sur l’essentiel. Si les derniers albums du groupe faisaient montre d’une tendance à l’excès, de morceaux et de temps, Suite 226 adopte le format d’un LP classique des eighties, avec dix morceaux pour à peine plus de trois quarts d’heure. Bien vu, puisque l’inspiration ne subit pas de perte de pression, Magic ayant accusé quelques baisses de régime il y a trois ans. Et dès les premières secondes de « Let It Go », nous sommes clairement plongés dans l’ambiance, avec ce beat chaloupé et ce riff typiquement inspirés d’IRON MAIDEN, quoi que le chant théâtral et appuyé de Breed évoque aussi les premiers albums en solo de KING DIAMOND. Heureusement, le groupe ne s’est pas contenté de recopier bêtement Seventh Son of a Seventh Son ou Abigail, et impose sa trademark avec ce refrain hautement mélodique et symptomatique de leur démarche. Nous évoluons donc en terrain connu, mais nous constatons avec satisfaction que les allemands n’ont rien perdu de leur superbe, ni de leur flair pour entraîner le Heavy du côté Pop le plus noble sans le trahir. Le son général ressemble en tous points à ce que le groupe nous a servi jusqu’à présent, mais on sent une envie de jouer et une énergie qui permettent à ce quatrième chapitre d’assez vite se hisser au niveau de leurs meilleures histoires.

Les références pour les néophytes seront évidentes. MAIDEN, HELLOWEEN, PLACE VENDOME, VANDEN PLAS, et tant d’autres qu’il est inutile de les nommer. En choisissant une fois de plus d’alléger le Heavy d’harmonies très prononcées, le quatuor confirme sa place sur le trône d’un Power Melodic Metal dont ils sont les plus fiers représentants. Ils n’hésitent d’ailleurs pas à adoucir encore plus le ton pour se rapprocher d’un Pop Rock aux guitares polies, sans tomber dans la vulgarité crasse d’une simple Pop travestie en hard-Rock pour plaire aux masses. Et lorsque « Fate Of All Humanity » distille sa mélodie hautement mémorisable sur fond de lignes vocales caressantes, nul n’est choqué, puisque le concept en lui-même permet toutes les audaces, et excuse toutes les incursions un peu trop déplacées aux oreilles des puristes. Rassurez-vous, et ce malgré l’enchaînement immédiat avec « Castiel » à l’intro doucereuse, Suite 226 n’est pas un rêve soft et ennuyeux, et la puissance est toujours maîtresse en ces lieux. Le groupe a simplement accentué tous les aspects de sa personnalité pour incarner une sorte de paroxysme, et c’est ainsi que le Power Metal est encore plus conquérant qu’avant (« When The Stars Are Right »). Le chant d’Urban a encore gagné en maturité, toujours aussi impressionnant en high range et plus stable en middle range, et les chœurs intelligemment placés sont toujours des soutiens de poids. Evidemment, rien de bien nouveau sous le soleil, et si les plus exigeants seront déçus des proportions somme toute assez raisonnables de l’album eu égard à son thème, les plus attentifs remarqueront des limites encore repoussées, menant à des hits vraiment enflammés (« Solitude Etude»). Certes, je le reconnais, tout ça a déjà été entendu sur les albums précédents du groupe, mais cette façon de délirer sur des arrangements classiques en claquant un chant vraiment personnel (« Heaven Shall Burn ») est parfaitement irrésistible, et il faudrait vraiment être un esprit chagrin ou un grincheux de dernière catégorie pour ne pas se laisser séduire.

On pourra déplorer le manque de folie de l’ensemble, qui aurait pu pousser le bouchon encore plus loin, mais le tout est tellement bien ficelé et les mélodies sont si attachantes qu’on en oublie les griefs, pourtant justifiés, lorsque « Way Back Home » nous chatouille les oreilles à la suédoise. SERIOUS BLACK ose même la douceur d’une ballade synthétique purement eighties, « Come Home » rappelant le romantisme des SCORPIONS et de EUROPE, sans sombrer dans la guimauve gluante, préparant habilement le terrain à contrepied pour le dantesque final. Et en lâchant en épilogue ce title-track de plus de huit minutes aux sonorités médiévales, Suite 226 nous permet de renouer avec la tradition MAIDEN/HELLOWEEN pour ces ambiances prenantes et étalées sur la durée, celles-là mêmes qui clôturaient leurs albums de légende. Evidemment, il est difficile de dire si le temps permettra à ce quatrième tome de la saga SERIOUS BLACK de se ranger aux côtés de références comme Seventh Son ou Keeper of the Seven Keys (bien que j’en doute), mais sans vouloir lui attribuer des prétentions qu’il n’a pas, Suite 226 reste un plaisir tout sauf mineur, et la preuve de l’ascension d’un groupe éminemment sympathique au royaume du Heavy mélodique et emphatique.  

              

               

Titres de l'album :

                             01. Let It Go

                             02. When The Stars Are Right

                             03. Solitude Etude

                             04. Fate Of All Humanity

                             05. Castiel

                             06. Heaven Shall Burn

                             07. Way Back Home

                             08. We Still Stand Tall

                             09. Come Home

                             10. Suite 226

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par mortne2001 le 06/06/2020 à 19:40
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