J’avoue que ces grecs ont raison. On s’emmerde toujours à vouloir coller de jolies étiquettes sur les albums, mais finalement, est-ce que ça a vraiment une utilité quelconque ? J’en suis même venu à en créer de toute pièce, histoire de rendre le jeu un peu plus amusant. Mais parfois, ce sont les artistes eux-mêmes qui se livrent à ce petit amusement, certainement fatigués de devoir répondre à la sempiternelle question :
« Et toi, à quoi tu joues ? »
Les DEPHOSPHORUS eux, jouent de l’Astrogrind. Rien à voir avec Astro Boy, ce petit super-héros impudique au torse nu, quoique niveau vitesse de propulsion, les deux doivent partager des poussées en commun. Non, les originaires d’Athènes ne se sont pas pris la tête pour être comparés à un mini-héros de bande dessinée juste pour faire les malins. Mais il est certain que leur créneau est du genre multiple, mais toujours extrême. C’est d’ailleurs ce qui lie leurs morceaux entre eux, cette glu extra-forte qui les fait s’empêtrer sur la palette collante de la violence, du Death au Grind, en passant par le Crust, le Powerviolence, et finalement, tout ce qui fait vite et qui va mal. Ou l’inverse, mais c’est pareil.
Et puis finalement, comme ce sont souvent les principaux intéressés qui se présentent le mieux, je leur laisse la parole sur quelques lignes pour vous éclairer :
« Avec six vinyles entre 2011 et 2015, les athéniens se sont embarqués dans un voyage cosmique. Leur concept et leur esthétique tirent leurs influences de la cosmologie, de l’astronomie, de la littérature de science-fiction comme de la sociopolitique et des répercussions existentielles. Le groupe définit simplement ce style comme étant de l’Astrogrind »
Vous me direz qu’avec ça vous n’en savez pas plus, et vous n’aurez pas vraiment tort. Alors affirmons, comme eux le font d’ailleurs, qu’Impossible Orbits est leur troisième longue durée, mais aussi leur effort le plus sombre et violent. Distribué par les mercenaires polonais de Selfmadegod (ce qui en dit déjà assez long en soi pour que vous chopiez l’importance du truc), ce nouvel LP a été enregistré et mixé analogiquement aux studios Unreal, et caché sous un artwork signé par Viral Graphics, et à l’écoute de ses pistes ébouriffantes, on comprend que les athéniens tiennent à garder une certaine patine vintage dans leur développement d’outrance. Alors oui, tout y passe, un peu comme d’habitude. Le Grind le plus velu, le Death le plus charnu, le Crust le plus bourru, et même le D-beat le plus ardu. Ils mélangent le tout dans un grand shaker de haine, et font gicler le tout en grandes gerbes qui vous éclaboussent les tympans sévère. Ça ne bricole pas, et pourtant ça n’est pas dénué de nuances, comme le prouve la grosse bourrade « The Light of Ancient Mistakes », qui s’éloigne un peu des systèmes solaires battus, pour se concentrer sur des circonvolutions plus lourdes et même parfois un peu Sludge sur les bords, sans tomber dans le statisme gênant. Il est toutefois difficile de se faire une idée précise sur les qualités et la diversité de DEPHOSPHORUS en se contentant de l’entame « Above The Threshold », qui tout en jouant franc jeu, se permet quand même quelques cachoteries sur le reste du contenu du voyage.
Ce voyage est éminemment rapide, chaotique, et souvent ultrasonique, mais sait aussi ralentir la cadence pour ne pas vous laisser KO avant l’arrivée.
Thanos Mantas (guitare), John Votsis (batterie), Panos Agoros (chant) et Costas Ragiadakos (basse) ont relativement bien assimilé le concept « d’extrême », et abordent tous les excès avec le manque d’empathie nécessaire pour transformer leurs morceaux en satellites tournant à une vitesse folle, mais stabilisant leur orbite d’une solide assisse rythmique concassante, qui leur permet de ne pas trop dévier de leur trajectoire. Chaque millimètre compte, et chaque impulsion aussi, ainsi, rien n’est laissé au hasard, comme le prouve la belle intro tournoyante de « Micro-Aeons Of Torment », qui débouche sur un couplet qui fera tourner en bourrique les NAILS de son mid tempo martelé comme des astéroïdes frappant de plein fouet la coque d’un Deathcore étrange et diffus.
Il n’est d’ailleurs pas interdit à ce moment-là du trip de penser à une version condensée et impitoyable d’ENTOMBED, tout du moins jusqu’à ce que la diagonale bifurque vers un Grind de plus en plus épileptique.
Neuf morceaux pour moins d’une demi-heure, il faut aller à l’essentiel sans s’interdire quelques fioritures. Mais avouons que dans un créneau pluriel, Impossible Orbits donne une sacrée leçon à tous les spationautes de l’extrême qui pourraient en tirer quelques enseignements.
En choisissant de ne pas choisir, mais en triant les aspects les plus violents et véhéments de chaque sous-genre, les DEPHOSPHORUS atteignent des sommets d’intensité, tout en jouant constamment sur la dualité lourdeur/cadence, avec un indéniable brio et une créativité remarquable.
« Rational Reappraisal » nous indique même que les athéniens connaissent la scène Core de l’Est sur le bout des combinaisons, même si une fois de plus ils ne résistent pas à tout envoyer valdinguer de blasts déchaînés.
Si les segments les plus Heavy les rapprochent d’un Death sludgy vraiment bourrin et dense, voire d’un Chaotic Core qui danse, le Grind reste quand même leur came, et suggère quelques accointances dans les plan de vol avec les ASSUCK et autres NASUM (« Impossible Orbits »).
C’est de temps à autres méchamment lugubre et accrocheur (« Suspended In A Void Universe »), un peu comme si UNSANE se payait un stage de simulateur de vol du côté de la base NOLA, avant de s’en trouver ennuyé et de partir comme des dératés Grind.
Dissonances éparses, riffs toujours noirs comme l’espace, chant qui égosille ses ordres en arrière-plan, mais thèmes qui déménagent et réaménagent façon Hardcore brisé (« Blessed In A Hail »), pour un trip dans les étoiles qui bouscule et bascule d’une galaxie à une autre.
Impossible de ne pas se montrer bluffé par cette troisième démonstration de force des grecs, qui semble effectivement être la plus intense et probante de leur carrière. Du Grind, du Death, Du Hardcore, du Crust, enfin un bon kérosène explosif pour traverser le ciel à la vitesse de la lumière, celle-là même qui n’éclaire jamais leur musique.
Titres de l'album:
Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)
16/09/2020, 22:12
16/09/2020, 21:49
15/09/2020, 22:30
15/09/2020, 22:06
gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)
11/09/2020, 12:32
Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???
11/09/2020, 10:59
Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)
11/09/2020, 08:04
Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...
11/09/2020, 07:25
Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)
10/09/2020, 21:27
Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)
10/09/2020, 11:22
J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)
10/09/2020, 11:18
L’interview de Napalm est toujours aussi intéressante.. quelle conviction et quelle carrière exemplaire.
10/09/2020, 09:45