Apocalyptic Rhymes

Septagon

09/11/2018

Cruz Del Sur Music

En termes de Metal, on a souvent une image assez cliché de la production allemande, considérée comme l’une des moins subtiles du monde. Les poncifs ont la vie dure, et nos pauvres amis d’outre-rhin pâtissent encore de l’image d’Epinal du musicien à grosse moustache jouant du Heavy qui tâche, iconographie héritée des 80’s, décade durant laquelle la sidérurgie nationale tournait à plein régime, et produisait des modèles à la chaine sans se demander si celles-ci étaient bien peaufinées. On associe encore à la vague Thrash l’affrontement des deux écoles, l’américaine synonyme de finesse instrumentale et de complexité mentale, et l’allemande, rimant avec gros riffs de Satan et rythmique martelant. Certes, les premiers efforts de SODOM et KREATOR n’ont pas franchement contribué à rendre la perception de la scène germaine plus modulée, mais quelques décennies s’étant écoulées entre temps, il est encore temps de revoir notre jugement. Certes, nous n’avons jamais vu émerger de Berlin de Brême ou d’Essen des DEATH ANGEL ou des WATCHTOWER, mais refuser de prendre en compte l’évolution du style prônée par les HOLY MOSES ou les DEATHROW durant leur période la plus complexe serait occulter l’un des pans les plus fascinants de l’histoire instrumentale locale, et en 2018, cette tradition semble se perpétrer grâce à l’un des combos les plus farouchement vintage de Heilbronn, les SEPTAGON qui justement, font tout ce qu’ils peuvent pour prouver que malgré la distance, le talent et la subtilité de la Bay-Area ont trouvé des échos concrets du côté de chez eux. Formé en 2013, ce quintette (Alexander Palma - basse, Jürgen "General" Schrank - batterie, Stef Binnig-Gollub & Markus "Ulle" Ullrich - guitares et Markus Becker - chant) aux noms assez connus dans l’underground (on retrouve d’actuels et anciens membres de THEM, A COSMIC TRAIL, LANFEAR, ATLANTEAN KODEX, soit quelques références notables) nous offre donc la suite de son premier effort, ce Deadhead Syndicate que 2016 n’a pas oublié.

Apocalyptic Rhymes est donc le second chapitre de la saga SEPTAGON, et autant dire qu’il continue le travail de polissage d’un Metal déjà brillant aux entournures. Sans connaître le groupe, difficile à croire qu’il se situe dans la plus droite lignée de la génération des DESTRUCTION et autres TANKARD, tant on se plairait plutôt à le situer du côté de l’engeance californienne de 87/88, eut égard à ses performances individuelles et sa cohésion de groupe dans le détail. En privilégiant un Thrash parfaitement modéré, tirant en plus d’une occasion sur un Speed léché ou un Heavy Metal surboosté, les cinq musiciens ont pioché la bonne carte, et nous ravissent les oreilles d’un mélange détonant qui unit d’un même sang les acrobaties rythmiques d’un DEATH ANGEL, le sens commun mélodique d’un TESTAMENT, et la franchise de pionnier de METALLICA. Nous évoluons donc en terrain old-school connu, mais la préciosité dont font preuve ces habiles pratiquants leur permet de se démarquer du tout-venant, mettant en avant de beaux arguments harmoniques qu’ils appuient d’une puissance indéniable, nous renvoyant même dans les moments les plus connotés à la grande époque du JUDAS PRIEST de Painkiller. Sans citer d’influences, on peut évidemment se rendre compte assez facilement que la vague Techno-Thrash US les a grandement marqués, tout comme la mouvance Power Metal des ANGRA, sans pour autant que les citations ne soient trop flagrantes ou que l’ombre de modèles trop présents ne leur cache la lumière. Et celle émergeant d’Apocalyptic Rhymes réchauffe les tympans, puisque en sus d’une efficacité redoutable, les allemands jouent la carte de la variété valable, conférant à chaque morceau une identité palpable.

Ainsi, la navigation se voit fluidifiée, l’attention éveillée, et les sens stimulés. Et passée une intro somme toute assez passe-partout, le groupe nous bouscule d’entrée avec un « The Weight Of The World » que les PANIC n’auraient pas renié. Heurts rythmiques, fluidité des mouvements, pratique individuelle remarquable, basse grondante en avant, on sent que les mecs ont du métier, mais qu’ils le pratiquent toujours avec une passion avouée. L’enthousiasme dont font preuve ces cinq musiciens est euphorisant, et on se retrouve basculé du côté clair de la force, à une époque où tout restait encore à faire et pas mal de choses à prouver. La dualité simplicité d’appréhension/complexité d’interprétation est assurément l’un des points fort d’un gang qui n’a pas les médiators et les baguettes dans sa poche, et cette faculté à combiner la percussion Hardcore d’un OVERKILL au sommet de sa forme et l’équilibre instrumental et mélodique d’un DEATH ANGEL période Frolic Through The Park subjugue, même lorsque le tempo décroit pour se mouler dans un schéma Heavy/Power sur le miraculeux et hargneux « Home, Sweet Hell ». Guitares en avant, qui tronçonnent des riffs faussement simples et des soli franchement aventureux, chant presque rappé, harmonies convaincantes et avancée perçante, la recette n’est pas si simple qu’elle n’en a l’air, mais reste susceptible d’intéresser tous les fans de Metal. Et la capacité des SEPTAGON à concentrer un maximum d’idées en un minimum de temps sur un morceau de la trempe de « Apocalyptic Rhymes » est assez époustouflante, d’autant plus que chaque plan à sa place et ne semble pas imbriqué pour rendre l’édifice plus impressionnant. Accélérations dantesques impromptues, cris à la Mark Osegueda, roulés de basse qui compressent l’espace, breaks finement amenés, l’ouvrage est ciselé et pourtant explosif, ce qui nous renvoie à cette fameuse dualité évoquée.

Si quelques figures imposées semblent quand même se tailler le chemin, on note un réel effort pour se tourner vers demain et pas seulement hier, et si les imbrications prennent plus d’importance que sur Deadhead Syndicate, nous restons quand même à l’orée du Techno-Thrash sans en franchir la ligne, et des ruades Heavy aussi compactes que « Make A Stand » permettent justement de leur franchise TESTAMENT de ne pas faire le pas de trop. Ce qui n’empêche nullement « P.O.T.U.S.A. » de multiplier les cassures et les aventures, prouvant le talent de frappeur inventif de Jürgen "General" Schrank, jamais avare d’une petite fioriture ou d’un renversement de tempo sûr. Et de fil en aiguille, de staccato en legato, l’album égrène ses litanies, et nous embarque dans sa folie, tout en restant cohérent et violent. Violent mais pas trop, un peu dans une optique HEATHEN plus radicale, lorsque les arguments progressifs s’imposent sur le final « Sunset Blood », sorte de crépuscule des doutes qui enterre les dernières interrogations et achève de transformer ce second LP en mine d’informations. Dès lors, il convient de reconnaître le potentiel d’un groupe qui aurait pu faire trembler la Californie sur ses bases sismiques, et qui démontre avec Apocalyptic Rhymes que hargne et fine poigne peuvent rimer avec Allemagne. Pour en finir une fois pour toutes avec les clichés.        


Titres de l'album :

                          1. The End

                          2. The Weight of the World

                          3. Home, Sweet Hell

                          4. Apocalyptic Rhymes

                          5. Make a Stand

                          6. The Unfathomable Evil

                          7. P.O.T.U.S.A.

                          8. Cosmic Outrage

                          9. Nothingness awaits

                         10. Sunset Blood

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par mortne2001 le 09/12/2018 à 17:35
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