II

Champlin Williams Friestedt

15/05/2020

Black Lodge Records

Cette chronique va s’adresser aux plus ouverts des membres de notre lectorat, et pour cause : ses participants ne gravitent pas vraiment dans la sphère Metal, mais représentent en quelque sorte la quintessence d’un Rock west-coast, de celui que les Etats-Unis vénéraient dans les années 70 et 80. Mais les initiés sauront tout de suite de quoi je parle, puisqu’ils suivent le projet depuis ses origines, lorsque ce trio n’était alors qu’un duo. Il y a dix ans, Joseph Williams alors fraichement revenu dans le giron de TOTO s’était associé au producteur/guitariste suédois Peter Friestedt le temps d’un album éponyme portant leurs deux noms, pour un passage en revue de toutes les facettes d’un Rock smooth, caractéristique de leurs carrières respectives. Quelques années plus tard, le duo devint trio, avec l’adjonction de l’ex-CHICAGO Bill Champlin, soit trois hommes qui se connaissaient bien et qui ensemble, étaient capables de produire la plus belle musique qui soit. Le premier effort des trois hommes respectait alors le cahier des charges AOR qu’on était en droit d’attendre de tels musiciens, et c’est en toute logique après un DVD live que le trio remet le couvert par l’entremise du label suédois Black Lodge Records, trop heureux de promouvoir une nouvelle tranche de vie en mélodie divine, de celles capables de vous faire oublier votre morne quotidien pendant quarante minutes. Evidemment, nous parlons-là de Rock FM de grande classe, dont les guitares sont assez éloignées des riffs auxquels nous sommes habitués, mais les rockeurs les plus durs ont un cœur aussi, et je suis certain que nombre d’entre vous sont aussi des fans de TOTO, REO SPEEWAGON, BOSTON, à même d’apprécier la qualité d’un album soft, mais délicat comme la rosée du matin sur une rose du jardin. Un peu de poésie n’a jamais fait de mal à personne, et si le premier volume du trio avait de faux-airs d’un inédit de TOTO enregistré à l’orée des années 90, II en garde les caractéristiques et propose encore une fois dix morceaux doux comme du velours, pas forcément agressifs, mais glissant sur les tympans comme le baiser d’un enfant au réveil.

Production parfaite qui nous replonge dans la Californie des eighties, harmonies vocales sublimes, osmose des talents, II est une véritable démonstration de savoir-faire prodiguée par des génies du genre, qui depuis des décennies se consacrent à leur passion, sans jamais l’avoir trahie. Ce second tome des aventures de CHAMPLIN/WILLIAMS/FRIESTEDT est le genre de trip nostalgique dont nous avons tous besoin en ces temps troublés par le chaos, et l’écouter, c’est s’assurer une place dans la capsule temporelle nous ramenant des années en arrière, lorsque les radios fondaient pour ces chansons d’une beauté formelle indéniable. Sans changer d’un iota leur approche, les trois hommes ont encore une fois trouvé l’inspiration pour pondre dix tubes qui pourraient indifféremment être des singles multi-platine, des bandes originales de film ou de série, ou tout simplement les plus beaux hommages à une période pas si révolue de la musique américaine. Evidemment, il me faut être franc, l’ensemble est très soft, ne provoquant jamais ou presque la distorsion, préférant reléguer la guitare au rang d’accompagnement discret, et laissant souvent les claviers voler la vedette. Mais avec la voix de Williams, le talent d’arrangeur et de producteur de Friestedt, et le flair de vieux loup de mer de Champlin, II approche d’une perfection dans la pureté, superposant les vocaux en solo et les chœurs célestes pour une nostalgie qui se déguste à plein cœur. Le trio, décidément plein de flair et de malice a placé en ouverture son titre le plus nerveux, et en tout cas le plus symptomatique d’un Rock pas trop fané de Soul ou ensuqué de Pop, et « Runaway Dancer » d’offrir une mise en jambes dynamique pour les fans de Rock FM trépidant et musclé. La voix de Williams, décidément plus assurée en studio qu’en live fait merveille sur ce titre simple comme un week-end entre amis, mais truffé d’arrangements précis et précieux. Mais dès « 10 Miles », la tension retombe, et le trio se permet des allusions plus directes à l’âge d’or de ses membres, avec une chanson symptomatique du TOTO de Seventh One. On s’y croirait, et on en attendrait presque un solo de Lukather tant le mimétisme est frappant, tout comme l’était celui du premier volume, et celui du premier duo entre Williams et Friestedt.

Bien entourés par des musiciens au pedigree aussi fameux que le leur, les trois compères partagent le disque avec quelques guests, dont le chanteur Michael McDonald, le batteur John JR Robinson (Michael Jackson, Quincy Jones), Randy Goodrum (TOTO, CHICAGO), Tamara Champlin et Diane Warren. Loin d’un simple gimmick, l’implication de ces invités apporte une grosse plus-value à un album qui rappelle le meilleur de la scène US de la seconde moitié des années 80, avec un superbe « Love In The World » partagé à plusieurs voix et dont le refrain est complètement irrésistible. Bien sûr, la dominante générale est délibérément douce et sans aspérités, mais quel bonheur de se replonger dans une époque que l’on a tant chérie, d’une adolescence passée à disséquer des albums proches de la magie, et de retrouver ces sonorités radiophoniques de grande classe, héritées de BOSTON, JOURNEY, mais aussi du CHIGACO de David Foster, et « Amanda’s Disguise » de réconcilier les fans de TOTO et de CHICAGO, avec encore une fois un enchevêtrement vocal à faire rêver les petits-enfants de la Motown. Il est possible de déplorer parfois le manque d’agressivité, et de se plaindre de l’optique soft choisie, mais avec des voix pareilles et des harmonies aussi travaillées, autant apprécier la douceur pour ce qu’elle est, et s’offrir un moment romantique en tête à tête avec ses souvenirs, nous lovant au creux de la voix de Williams pour un « Between The Lines » magnifique de cuivres. Toujours à la croisée des chemins entre smooth Jazz, soft Pop et Rock en allusions, II est un manifeste de bonheur, le genre de LP qu’on se joue pour faire une pause dans la morosité ambiante, et qui redonne le sourire. La reprise de « Price Of Love» de BATON ROUGE permet à Tamara Champlin de nous délecter de sa voix, mais aussi de durcir un peu le ton, et la version proposée n’a pas grand-chose à envier à l’original, malgré une tension désamorcée. Elle permet en tout cas d’excuser une autre reprise, celle de « Sometimes You Win », certes toujours aussi jazzy et ouvragée, mais qui n’apporte pas grande chose à celle proposée sur le premier album et écrite par Randy Goodrum et Jay Graydon.

Sans chambouler l’ordre des choses, en respectant leurs inclinaisons, et en se permettant quelques facilités décrites plus haut, le trio CHAMPLIN/WILLIAMS/FRIESTEDT nous fait quand même cadeau d’un LP dégoulinant de nectar, doux aux oreilles, et réchauffant le cœur. Ce qui à notre époque est déjà un sacré présent venu du passé.                   

                      

Titres de l’album :

01. Runaway Dancer

02. 10 Miles

03. Love In The World

04. Amanda’s Disguise

05. Between The Lines

06. Look Away

07. All That I Want

08. Restless Love

09. Price Of Love

 10. Sometimes You Win


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par mortne2001 le 14/11/2020 à 14:23
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