J’aime être surpris, mais comme tout homme faible, j’aime aussi être rassuré. Être cajolé par une musique qui me ramène dans le giron de mon adolescence, lorsque tout était encore possible et facile, et que l’avenir se voulait plus prometteur que mon présent. Et pour en retrouver les sensations, il y a toujours la possibilité de se replonger dans les disques d’époque, version CD évidemment, tout en imaginant le bruit du diamant se posant sur les sillons et les légers craquements qui accompagnaient l’intro. Ou alors, de se fondre dans la masse de la mode, et céder aux sirènes de la nostalgie actuelle, et de craquer pour un groupe qui lui aussi aime à être rassuré en jouant un boucan estampillé eighties, juste pour le plaisir de ne pas grandir. Et à ce petit jeu de la régression assumée et contrôlée, beaucoup d’artistes peuvent prétendre avoir touché du doigt la quintessence du flashback, imitant à merveille nos idoles de l’époque, et proposant même parfois des prolongations qui auraient pu prendre vie il y a trente ans, si nos artistes préférés en avaient décidé autrement. On le sait, les rois, les princes, les légendes et mentors de l’exercice viennent souvent des pays nordiques, Suède, Norvège, Danemark, des pays qui dans les années 80 étaient légèrement à la traîne, mais qui depuis ont méchamment comblé leur retard. Et dans le cas des NOCTURNAL BREED, la problématique est plus complexe, le groupe ayant émergé dans les années 90 avec une première démo publiée en 1996 (Raping the Angels), et la seconde en 1997 (Black Cult). Difficile donc de les taxer d’opportunistes, puisqu’ils étaient plus ou moins là avant tous les autres, mais avec un sixième album au compteur, ils font aujourd’hui partie de l’arrière garde belliqueuse du nord, et affirment encore plus leurs positions déjà bien énoncées sur des efforts comme The Tools of the Trade ou Aggressor. Pas vraiment régulier, le quatuor (S. A. Destroyer - basse/chant, Axeman I. Maztor - guitare, Tex Terror - batterie et V. Fineideath - guitare) ne nous avait pas donné signe de vie depuis 2014 et la parution de Napalm Nights, qui avait rassuré, mais pas vraiment transcendé. Il faut dire qu’avec l’explosion en 2007 de Fields of Rot, apparenté à une sorte de Reign in Blood du nord et ses trente-deux minutes corrosives, la barre était placée très haute. Et une fois encore, les norvégiens n’en ont pas dépassé la performance, mais nous enchantent de leur approche unique, en crossover lubrique.
Faisant fi d’une quelconque retenue temporelle, les quatre olibrius nous en reviennent avec cinquante minutes de chaos sous les aisselles, minutes bien tassées en idées qui ne font d’ailleurs que reprendre les précédentes. On ne dévie pas une philosophie qui marche, et ce Blackened Thrash qu’on n’appelait d’ailleurs pas comme ça à l’époque se montre toujours aussi performant et cruel dans son rendu, louvoyant entre Black light, Thrash paillard mais appuyé, Punk pour l’attitude et presque Death dans certaines inflexions, se montrant lui-même inflexible et toujours aussi attaché à des valeurs de simplicité et de violence. Et violent, We Only Came for the Violence l’est, assurément, malgré son titre en forme de clin d’œil au We're Only in It for the Money de Zappa. Moins iconoclastes et lettrés que le maître du Jazz-Rock Wop des sixties et seventies, les originaires d’Oslo que sont les terribles NOCTURNAL BREED n’en ont pas moins une solide culture underground, qui leur permet toujours de citer VENOM, MOTORHEAD, CELTIC FROST, IMPALED NAZARENE, BULLDOZER ou AURA NOIR dans le texte, tout en y insérant des allusions aux DESASTER, NOCTURNAL, SODOM, BATHORY, et WITCHERY, sans perdre de leur individualité. Toujours aussi prompts à varier les ambiances et multiplier les mutations, les norvégiens nous baladent donc d’une sortie nocturne en décor post-apocalyptique à un cheminement plus déhanché au milieu des ruines d’un Heavy Punk vraiment allumé, et nous enchantent de leurs morceaux qui n’ont pas oublié qu’avant d’être provocant, il fallait être accrocheur. Et c’est ainsi qu’ils se lâchent durant de longues minutes sur la fin de l’effort, nous martelant de mid-tempi redoutablement efficaces, à l’image de cette doublette fatale « War-Metal Engine » / « Can't Hold Back the Night ». Ces deux morceaux, plus construits, épais et évolutifs que leurs petits frères d’armes, sont définitivement la preuve que les norvégiens sont plus malins et intelligents que la moyenne, et surtout, de bien meilleurs compositeurs, qui acceptent la compromission d’un Heavy vraiment attachant pour faire passer leur pilule de violence crue dans les tympans. Entre des riffs qui aplatissent, mais avec le sourire, des soli mélodiques et des arrangements finauds qui instaurent une ambiance, We Only Came for the Violence prouve que le groupe n’est pas juste venu foutre le bordel, mais aussi nous prouver que le Heavy Metal sale et graisseux a encore de très belles nuits devant lui.
Cela dit, ne soyez pas effrayé par ces accès de mansuétude, puisque le quatuor n’a certainement pas renoncé à ses penchants les moins avouables, prenant toujours un malin plaisir à mutiler le cadavre de DESTRUCTION pour nourrir les charognards d’AURA NOIR. Ainsi, l’ouverture dramatiquement bordélique de « Choke on Blood » rappelle le pire du meilleur du Thrash italien des années 80 dopé au Punk américain des années 90, tandis que le barbare « Nekrohagel » nous rappelle qu’avant d’être Thrash, le Thrash fut Speed, parfois complètement déjanté, et souvent malmené entre les bonnes mains calées. Les qualités intrinsèques du groupe sont toujours aussi présentes, mais aussi ses petits défauts, avec cette facilité de passer du coq Thrash à l’âne Black sans aucune fluidité dans la transition, mais avec un tel art consommé pour composer des parties qui restent dans le crâne, on leur pardonne tout, surtout si le résultat est aussi probant que ce « We Only Came for the Violence », que Tom Warrior aurait pu chanter dans HELLHAMMER. Et aussi bourrins puissent-ils être, les NOCTURNAL BREED n’en sont pas moins joyeux et attachants dans l’exubérance, des cousins pas si attardés qu’on prend plaisir à retrouver, parce qu’ils ont toujours une bonne blague élaborée à raconter. Certes, ils radotent parfois (« Frozen to the Cross »), mais quand ils s’y mettent vraiment, ils n’hésitent pas à ne pas rentrer dans le rang et à parler plus vite qu’une mitraillette (« Desecrator »). Et sans abuser d’images toutes plus grotesques les unes que les autres, affirmons que ce sixième LP qui se sera fait attendre cinq ans comble le vide du silence laissé, et nous renvoie l’image d’un groupe toujours aussi à l’aise avec son style bâtard, fait de bric Thrash et de broc Black, mais aussi de gros Heavy qui tâche et qui fâche (« Sharks of the Wehrmacht », du ACCEPT passé à la moulinette RUNNING WILD des premières années, et l’un des meilleurs titres de l’album, dans un style hymne côtier et viril).
Moins immédiat que certaines réalisations passées, mais plus fouillé, We Only Came for the Violence est plus fourbe qu’il n’y parait, et fait preuve d’une certaine maturité. Comme quoi, le cas n’est pas désespéré…
Titres de l’album :
1.Iron Winter (Intro)
2.Choke on Blood
3.Nekrohagel
4.We Only Came for the Violence
5.Frozen to the Cross
6.Desecrator
7.Cannibalized by Fear (Intro)
8.Sharks of the Wehrmacht
9.Limbs of Gehenna
10.War-Metal Engine
11.Can't Hold Back the Night
12.Bless the Whore
13.A Million Miles of Trench
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24/09/2024, 12:17
Du texte en grasDu texte en italiqueDu texte soulignédu texte barrédu texte en vertune liste d'item numérotée(...)
16/09/2020, 22:12
16/09/2020, 21:49
15/09/2020, 22:30
15/09/2020, 22:06
gros souvenirs, j'y avais emmené mon neveu de 7 ans et demi ! c'etait drole les regards partagés des gens entre "cool la relève" et "ce n'est pas un endroit approprié pour un enfant " lol. ce qui etait drole aussi le nombre de gens qui se sont barrés après slayer ...comme nous ;)
11/09/2020, 12:32
Novateur ? Je ne sais pas du tout ce que la "presse" en dit mais moi je le trouve très varié (y'a tout NAPALM là dedans !), pas mal de côtés GODFLESH aussi... Pis même un titre totalement KILLING JOKIEN ("Amoral"). Bref, j'adore !!! Album de l'année ???
11/09/2020, 10:59
Barney, toujours aussi intéressant en interview. Bon sang j'adore ce type !!! J'adore l'écart qu'il y a (toujours eu) entre l'aspect brutal de leur musique et le fond, l'esprit derrière tout ça. Quant au dernier album, j'ai bien envie de craquer aussi... Il est aussi "novateur(...)
11/09/2020, 08:04
Nubowsky + 1000000 !!! Le dernier album en date est juste EX-TRA-OR-DI-NAIRE !!! !!! !!! Il tourne en boucle chez moi en ce moment...
11/09/2020, 07:25
Bel effort qui illustre bien le retour en grâce dont bénéficie cet album depuis, disons, une douzaine d'années, et après être passé pour le plus faible dans l'opinion générale jusqu'à la sortie de "Load". Tout est dit ici dans les faits, qui sont au demeurant bien connus. Ce (...)
10/09/2020, 21:27
Sabaton, je n'y prête même plus attention. Pas ma came mais je respecte ceux qui aiment. Y a pas de mauvais Metal. - Le bon Metal, c'est quoi ? Bah tiens, tu prends ce disque là, tu le poses sur la platine, tu écoutes. Bah, c'est du bon Metal. Et le mauvais Metal ? Ah..(...)
10/09/2020, 11:22
J'ai bien aimé celle de David White (Heathen, chant). On sent que l'intérim des gratteux chez Exodus lui a bien cassé les couilles, tout comme le fait que Kragen Lum se soit pointé avec la totalité du nouvel album entièrement composé par lui et que White ne pouvait même pas y apporter ses te(...)
10/09/2020, 11:18